19, 20 et 21 octobre 2024
Visite des descendants des familles Johnston
et Gwilliam
Rubescourt (Somme)
Le Frestoy-Vaux, Maignelay, Coivrel, Beauvais (Oise)
Pantin (Seine-Saint-Denis)
Copyright © 2024 - Association des Sauveteurs d'Aviateurs Alliés - Tous droits réservés - In English
Cette visite ayant été reportée depuis 2020 en raison de la pandémie, nous avons enfin eu l’honneur d’accueillir Colin et Bradley Johnston, en provenance de Melbourne (fils et petits-fils du F/Sgt Eric L. Johnston) ainsi qu’Erin Sharp (belle-fille du F/Sgt James P. Gwilliam) venue de Sydney qui était accompagnée de sa nièce Tara. Ces familles avaient entrepris ce long voyage depuis l’Australie afin de tenter de lever les zones d’ombre liées à l’aventure de leurs pères.
Leur visite a tout d’abord débuté, dans la matinée, à Rubescourt (Somme), petit village de 135 habitants près duquel le bombardier Halifax MZ692 du Squadron 78 s’était écrasé dans la nuit du 22 au 23 juin 1944.
Mme Chantal Desprez, maire de la commune, des membres de son conseil municipal et de nombreuses personnes intéressées par l’Histoire et la venue de ces familles australiennes nous ont accueillis. Deux véhicules d'époque (une Jeep et un Dodge) nous ont ensuite emmenés sur le site du crash situé dans une pâture, proche de la ferme de Pas.
Sur place, M. Moreau, propriétaire du lieu, a remis, à la grande surprise de nos amis australiens, des morceaux d’aluminium, provenant du bombardier, retrouvés au fil des ans.

M. Moreau remettant un débris du Halifax à Colin Johnston

Erin Sharp tenant également un vestige de l’avion.

Photo-souvenir avec certains descendants des familles qui hébergèrent les aviateurs.

Colin conduisant le Dodge qui nous ramena au cœur du village.
S’ensuivit une réception à la mairie où Mme Chantal Desprez et son conseil municipal nous ont conviés au verre de l'amitié.
Un habitant du village a alors remis avec une émotion partagée un dictionnaire retrouvé parmi les débris de l'avion en 1944 et conservé depuis.
Dans l'après-midi, Le Frestoy-Vaux fut notre prochaine étape, un village divisé en trois partie : Le Frestoy, Vaux et le Tronquoy. C'est sur le territoire de cette commune que trois membres de l'équipage, Eric Johnston, James Gwilliam et le pilote Robert Mills, sont tombés séparément en parachute. A Le Frestoy, les descendants de la famille Dufeu nous ont montré la ferme où Robert Mills fut hébergé par leur grand-père.

La grange jouxtant la ferme où fut caché Robert Mills.

En compagnie des descendants de la famille Dufeu devant l’ex-ferme familiale.
Puis nous nous sommes rendus à Vaux mais, hélas, la maison au toit en ardoises sur laquelle Eric Johnston avait atterri n’existe plus et a été remplacée par une maison neuve.
Enfin Le Tronquoy. C’est à proximité de ce hameau qu’avait atterri, dans un arbre, James Gwilliam avant d’être hébergé temporairement dans une petite maison. Le propriétaire de la ferme nous a indiqué l’emplacement du bois du Tronquoy où l’aviateur était resté quelques temps suspendu à son parachute emmêlé dans les branches.

Bradley, Colin, Tara et Erin près du bois du Tronquoy.

Une des maisons près de la ferme où James Gwilliam fut probablement recueilli.
Via Le Ployron où malheureusement le passage à niveau « 75 » n’existe plus, tout comme la maison de Germaine Carlier, nous avons atteint Maignelay où nous avons été rejoints par plusieurs descendants des familles qui étaient venus en aide aux aviateurs dans les différents villages alentours. En plus de la famille Dufeu, étaient représentées les familles Levasseur, Floury, Duriez, Horb et Lherminier. Nous nous sommes rendus devant l'ex-maison de Pierre Gager qui hébergea Eric Johnson et Robert Mills.

Devant la maison de Pierre Gager

Sur chaque lieu, des explications étaient données,traduites en anglais par notre ami Franck Signorile.
Dernière étape de la journée : Coivrel, d’abord dans le cimetière pour un moment particulièrement fort en émotion devant la tombe du couple Creton, propriétaire du café qui hébergea les aviateurs australiens. M. Guy Pieronne, leur petit-fils, qui aurait dû être parmi nous, avait demandé à Colin Johnston de procéder à un geste symbolique ayant beaucoup d’importance à ses yeux.
A la fin du mois de juillet 1944, le couple Creton laissait partir les aviateurs après avoir tissé des liens d’amitié très forts avec eux. Les quatre Australiens devaient rejoindre un autre groupe de résistants puis être rapatriés par avion vers l’Angleterre le soir même. Ils s’étaient mis d’accord avant leur départ : un message codé serait émis sur les ondes de la BBC, prouvant qu’ils étaient bien arrivés à Londres, sain et sauf. Le soir même et les jours suivants, les Creton écoutèrent l’émission « Les Français parlent aux Français » sur Radio-Londres mais le message ne fut pas diffusé. Il ne le fut jamais. Et pour cause, les aviateurs étaient tombés dans un piège et avaient été arrêtés par les Allemands.
Les Creton sont décédés sans savoir ce qui était arrivé à leurs protégés.
80 ans plus tard, devant la sépulture des grands-parents de M. Pieronne, Colin Johnston, submergé par l’émotion, a pu enfin prononcer cette phrase codée qu’ils auraient tant aimé entendre à la BBC : « Les rois sont couronnés ».
Puis nous avons déambulé dans les rues du village, à la découverte des différentes maisons où avaient trouvé refuge les aviateurs Robert Mills, Keith Mills, Eric Johnston et James Gwilliam.
D’abord l’ex-maison de Paul Omnès. En effet, selon les souvenirs d’Eric Johnston, c’est à l’arrière de cette maison que fut prise la photo des aviateurs en compagnie de leurs sauveteurs avant leur départ de Coivrel fin juillet 1944. La propriétaire actuelle de la maison, avec une extrême gentillesse, nous a permis de nous rendre dans son jardin afin de reproduire, 80 ans après, une photo similaire à celle de 1944.

Dans le jardin de la maison de Paul Omnès, les familles Horb, Lherminier et Dufeu réunies avec nos amis australiens.
Nous nous sommes ensuite arrêtés devant l’ex-café-épicerie que tenait la famille Creton pendant la guerre. La façade a peu changé si ce n’est que ce n’est désormais plus un café. Surpris mais ravis de cette visite insolite de nos amis australiens dans leur village habituellement si calme, les propriétaires les ont exceptionnellement autorisés à visiter l’intérieur de leur maison.
Après un arrêt au monument aux morts où une gerbe a été déposée par la municipalité et le respect d’une minute de silence, nous avons été conviés à la mairie par Mme Aline Larue, maire du village, et son conseil municipal, où une réception était organisée.
Cette mairie était aussi l’école où habitait et enseignait Fernande Horb qui, avec son mari, participa à l’hébergement des aviateurs. La salle polyvalente où nous nous sommes rassemblés était d’ailleurs sa salle de classe. Une exposition préparée par la municipalité, composée de nombreuses photos et de documents était présentée.
En présence de M. Patrice Fontaine, Conseiller départemental et maire de Le Frestoy-Vaux, de Mme Chantal Desprez, maire de Rubescourt, des descendants des familles qui vinrent en aide aux aviateurs et de nombreux amis, Mme Aline Larue, après avoir souhaité la bienvenue à nos amis australiens ainsi qu’à toute l’assistance, déclara « Nous levons un douloureux pan de l’histoire de notre village mais qui nous fait honneur…. »
Patrice Fontaine prononça quelques mots puis l’aventure vécue par les aviateurs australiens a été décrite. S’ensuivit la lecture d’un message de la part de Guy Pieronne, petit-fils de la famille Creton, qui était malheureusement absent.
Très ému, Colin Johnston a prit ensuite la parole, la traduction en français étant assurée Franck Signorile :
« Bonjour, je m'appelle Colin Johnston. Je suis le fils d'Eric Johnston. J'ai fait tout ce chemin depuis l'Australie pour être présent ici, aujourd'hui.
Je suis ici pour exprimer ma gratitude aux enfants et petits-enfants des hommes et des femmes qui ont aidé mon père lorsqu'il en avait grandement besoin.
Comment dire merci à quelqu'un qui aide une personne qu'il ne connaît pas, qu'il n'a jamais rencontrée, et qui, en faisant cela, met sa propre vie en danger ?
Si toutes vos familles n'avaient pas fait preuve de compassion et n'avaient pas offert protection et nourriture aux quatre jeunes aviateurs abattus au-dessus de la France en 1944, je ne serais peut-être pas ici pour vous parler aujourd'hui.
Bob Mills, Jimmy Gwilliam, Keith Mills et mon père Eric Johnston ont eu la chance de rencontrer vos familles à un moment où elles en avaient le plus besoin.
C'est grâce à leur générosité que mon fils Bradley et moi-même pouvons assister à cette cérémonie aujourd'hui. Au nom des quatre familles de ces hommes, je remercie du fond du cœur les familles suivantes : la famille Creton, la famille Duriez, la famille Dufeu, la famille Levasseur, la famille Gager, la famille Lherminier, la famille Horb, la famille Floury et probablement d'autres familles qui n'ont pas encore été identifiées à ce jour.
Bien que les quatre hommes aient été capturés après avoir quitté ce sanctuaire, la générosité de vos familles n'a jamais été et ne sera jamais oubliée.
L'organisation de cet événement a pris de nombreuses années avant d'aboutir, en raison de circonstances imprévues, telles que le Covid.
Je voudrais saisir cette occasion pour remercier également Franck Signorile et Dominique Lecomte, pour les longues heures et les efforts qu'ils ont déployés pour rendre cet évènement possible.
Sur une note plus personnelle, je tiens à remercier Guy Pieronne, qui hélas n'a pas pu venir aujourd'hui.
Merci, merci beaucoup ».
Erin Sharp a également fait part de son émotion en rendant hommage aux familles qui avaient aidé les aviateurs.
« Aujourd'hui, c'est avec gratitude que je me tiens devant vous pour évoquer un chapitre important de notre histoire commune, un chapitre qui nous touche tous profondément. Il s'agit d'une histoire de bravoure, de sacrifice et d'esprit d'humanité, centrée sur les membres de vos familles qui ont aidé de manière désintéressée quatre hommes qu'ils ne connaissaient pas.
Lorsque mon beau-père a été abattu au-dessus de la France et séparé de son équipage, il a été confronté à une situation redoutable qui aurait pu se terminer en tragédie. Pourtant, dans ce moment sombre, le courage et la compassion de la Résistance française - vos proches - ont brillé de mille feux. Ces hommes et ces femmes remarquables, unis par leur détermination inébranlable à s'opposer à la tyrannie, ont risqué leur vie pour protéger et aider ceux qui étaient dans le besoin.
Au cours de cette épreuve, mon beau-père a perdu une chaussure, une expérience qui l'a manifestement marqué. Cette expérience lui a appris l'importance de prendre soin de nos biens, en particulier des chaussures. Il insistait toujours sur le fait qu'il fallait les cirer tous les jours et qu'il fallait avoir la bonne paire pour chaque occasion. En fait, j'ai apporté quatre paires avec moi pour ce voyage, même si je ne suis là que pour six jours !
Aux âmes courageuses qui ont offert un abri, de la nourriture et des conseils, leur altruisme n'est pas passé inaperçu. Grâce à leur extraordinaire gentillesse, j'ai pu appeler James Gwilliam mon beau-père.
Aux familles qui lui ont offert un havre de paix, j'adresse mes remerciements les plus sincères. Vos actions nous rappellent la force profonde de la solidarité et l'importance de défendre ce qui est juste.
Puissions-nous toujours nous efforcer d'être une lueur d'espoir pour les autres, tout comme la Résistance française l'a été pour mon beau-père.
Je voudrais également exprimer ma sincère gratitude à Franck Signorile et Dominique Lecomte pour leur dévouement pour leurs recherches sur cet événement historique. Merci »
Cette journée intense se termina par le verre de l'amitié et d’une profusion de gâteaux et autres offerts par la municipalité. Ce moment de convivialité a été l'occasion de nombreux échanges et de partages entre tous.

A gauche, Mme Aline Larue, maire de Coivrel.

Les descendants des familles qui hébergèrent les aviateurs entourant nos Australiens.
Le 20 octobre, nous sommes allés sur la route menant de Chepoix à Breteuil, où les quatre aviateurs avaient été capturés par les Allemands après avoir été trahis. Puis Beauvais, devant l'emplacement de l'ex-caserne Agel où ils furent détenus. Ne subsiste aujourd’hui qu'un monument commémoratif.
Le 21 octobre, nous nous sommes rendus à Pantin où rendez-vous avait été pris avec Pierre Gernez, secrétaire de l’Association des Amis du Musée de la Résistance nationale de Seine-Saint-Denis et Cynthia Beaufils, responsable du Pôle Mémoire et Patrimoine à la ville de Pantin. Ceux-ci étaient accompagnés d’une interprète et de quelques journalistes. Avec l’autorisation de la SNCF, nous avons pu accéder au quai à bestiaux le long des voies ferrées. Ce lieu chargé d'histoire est d’ordinaire privé et interdit au public. C’est là que, le 15 août 1944, les aviateurs embarquèrent, parmi plus de 2 200 déportés, dans le convoi à destination du camp de concentration de Buchenwald.
Une visite exceptionnelle et intense en émotion.
« Quand ils sont rentrés en Australie, personne ne les croyait. Ils n’étaient pas tatoués et normalement les aviateurs n’auraient jamais dû aller en camp de concentration » déclara Erin.
Cette journée s’est achevée dans une salle de la mairie où Franck a exposé ses recherches concernant les aviateurs alliés déportés.
Quelques jours auparavant, Colin et Bradley s’étaient rendus en Allemagne où ils avaient visité le camp de concentration de Buchenwald.
Colin de conclure : « L’ensemble de ces journées de visite fut un mélange d’étonnement et d’extrêmes émotions comme l’excitation, le bonheur et la tristesse. Sans aucun doute les blancs ont été remplis, plus encore que je ne le pensais possible ».
24 et 25 septembre 2024
Visite de Laurie et Richard Feingold
Campremy, Saint-Just-en-Chaussée, Clermont,
Noailles et Auneuil (Oise)
Au cours du mois d’août, nous avons eu l’agréable surprise d’être contacté par Richard et Laurie Feingold, fils et fille du 2nd Lt Louis Feingold, qui exprimaient le désir de se rendre en France pour retracer le parcours de l’évasion de leur père.
Le 2nd Lt Louis Feingold était navigateur à bord de la Forteresse volante « Destiny’s Tot » tombée à Campremy le 30 décembre 1943 au retour d’une mission de bombardement sur Ludwigshafen, en Allemagne.
Arrivés du New Jersey, Richard et Laurie se sont d’abord rendus à Plouha (Côtes d’Armor), pour découvrir le lieu où leur père, pris en charge par le réseau d'évasion Shelburn, fut exfiltré vers l'Angleterre depuis la plage de l'anse Cochat.

Plouha - Plage Bonaparte
Leur visite s’est ensuite poursuivie dans l’Oise pendant deux jours, d’abord à Campremy, sur le lieu du crash, puis sur le secteur où leur père a atterri en parachute et ensuite à Saint-Just-en-Chaussée.

Campremy, lieu du crash du B-17 « Destiny’s Tot ».

Entre Catillon et Saint-Just-en-Chaussée. Lieu présumé où le 2nd Lt Feingold a atterri en parachute.
A Saint-Just-en-Chaussée, ils ont pu découvrir l’ex-maison de Jean Crouet qui fut le premier à venir en aide et à héberger le 2nd Lt Feingold et son équipier, le 2nd Lt Tarkington, puis l’ancienne boulangerie dirigée, à l’époque, par Léon Hary chez qui les deux aviateurs séjournèrent du 1er au 3 janvier 1944, avant de revenir chez Jean Crouet.

La maison de Jean Crouet.

Devant la boulangerie « Hary »
Au cours de cette visite, Richard et Laurie ont pu rencontrer les deux petites-filles de Léon Hary qui leur ont permis de visiter l’arrière-cour de la boulangerie et la sous-pente, à l’étage, où était caché leur père.
La suite de cette journée s’est déroulée à Clermont. Louis Feingold, toujours en compagnie de Warren Tarkington, y séjournèrent du 6 au 21 janvier 1944, chez Odette Sauvage et Gaston Legrand. Ils ont pu rencontrer Jean-Marc Sauvage, l’un des petits-fils d’Odette, jamais avare d’anecdotes à propos des aviateurs hébergés par sa grand-mère pendant la guerre.

Avec Jean-Marc, devant la maison où habitait Odette Sauvage.
En fin d’après-midi, Richard et Laurie ont eu l’honneur d’être reçu à la salle des Gardes de l’hôtel de ville de Clermont. Accueillis par la municipalité et l’Association des Anciens FFI, Lionel Ollivier, maire de la ville, souligna qu’il était très heureux de les accueillir et de constater qu’ils cultivent, eux aussi, ce devoir de mémoire si important. Puis, avec Cécile Grange, adjointe en charge de la Culture, la Médaille de la Ville a été remise à nos deux visiteurs.
Très émue, Laurie avait du mal à cacher son émotion. « Nous sommes très reconnaissants envers Odette et Gaston. Sans eux, nous ne serions pas là car notre père ne serait jamais rentré en Amérique ».
Richard rappela que, régulièrement, son père racontait l’aventure qui avait marqué sa vie. « Il se considérait très chanceux de s’en être sorti, notamment grâce à tous les Français qui ont bien voulu l’aider et le cacher, comme Odette et Gaston. Nous-mêmes sommes très honorés d’avoir pu les connaitre, ils étaient des amis de nos parents ».
L’ensemble du parcours de l’évasion du 2nd Lt Louis Feingold a ensuite été évoqué avant de partager le verre de l’amitié.
Présents également, quelques membres de l’Association « N’oublie pas 44 » ont permis à nos amis d’effectuer une petite ballade dans les rues de la ville à bord d’un véhicule américain d’époque à l’issue de cette réception.
La visite de Richard et Laurie s’est poursuivie le lendemain à Noailles. Nous avons été chaleureusement accueillis par Gérard Eckert et sa famille qui occupent toujours la ferme où tant d’aviateurs avaient été hébergés par leurs parents au cours de la Seconde Guerre mondiale. La famille Eckert avait préparé une petite exposition et des documents d’époque furent partagés.
En septembre 2023, une plaque, apposée sur le porche, avait été dévoilée portant les noms des aviateurs alliés qui avaient trouvé refuge chez Robert et Marthe Eckert. Laurie et Richard ont pu découvrir, avec beaucoup d’émotion, le nom de leur père gravé dans le marbre. Il séjourna en ce lieu du 22 au 24 janvier 1944.
La dernière étape de la visite se déroula à Auneuil où nous avons d’abord été aimablement reçus par l’actuelle propriétaire de la maison qu’occupait Gilbert Thibault pendant la guerre. Créateur du réseau d’évasion Alsace, celui-ci hébergea les 2nd Lts Louis Feingold et Warren Tarkington à partir du 24 janvier jusqu’au 27 janvier 1944, date à laquelle ils furent convoyés à Paris.
Une réception en l’honneur de la visite de cette famille américaine s’est ensuite déroulée à la mairie. En l’absence du maire, excusé pour raison personnelle, M. Jean-Marc Rozé, maire-adjoint, a prononcé un discours de bienvenue en l’honneur de la visite des descendants du 2nd Lt Louis Feingold.
« …A travers vous, c’est la mémoire de votre père que nous honorons mais également celle de l’ensemble des aviateurs alliés qui ont été recueillis par la Résistance française. C’est l’occasion pour nous de mettre également à l’honneur, une nouvelle fois, la mémoire de Gilbert Thibault, l’un des plus grands résistants de l’Oise, chef du réseau « Alsace », qui a permis l’hébergement de plus d’une centaine de ces aviateurs, comme votre père en 1944, avant de les faire rapatrier vers l’Angleterre par différentes filières. Trop longtemps oublié, notre commune lui a rendu hommage le 8 mai 2022 et à travers lui à l’ensemble des personnes qui ont œuvré à ses côtés au péril de leur vie… »
Puis, au nom de maire et de son conseil municipal, Richard et Laurie se sont vus remettre chacun la Médaille de la Ville, matérialisant leur passage dans la commune mais surtout le lien qui existe entre Auneuil et leur père.
Richard Feingold voue une véritable passion pour l’histoire vécue par son père au cours de ses missions et de son évasion en France. Il anime souvent des conférences aux Etats-Unis auprès des jeunes et des moins jeunes permettant de faire perdurer le devoir de mémoire. Les différents lieux visités et les rencontres avec les descendants des familles françaises lui permettent désormais d’étayer ses présentations et de mieux comprendre comment son père a pu rejoindre l’Angleterre après deux mois de clandestinité parmi ceux qui lui vinrent en aide.
15 juin 2024
80e anniversaire du crash du Lancaster HK559
Squadron 115 de la Royal Air Force
Gannes (Oise)
A l’occasion du 80e anniversaire du crash du Lancaster HK559, du Squadron 115 de la Royal Air Force, une cérémonie a été organisée en mémoire des 7 aviateurs australiens et britanniques qui perdirent tragiquement la vie au cours d’une mission de bombardement dans la nuit du 17 au 18 juin 1944 sur le territoire de la commune de Gannes.
Au cours de cet hommage, nous avions le grand honneur de compter parmi nous Daryl et John Van Cooten, neveux du F/S John W. Van Cooten, accompagnés de leurs épouses et d’amis venus d’Australie, ainsi que Ian Duff, neveu du W/O Peter Duff, accompagné de son fils et de son petit-fils venus d’Ecosse.

Les deux familles se rencontraient pour la première fois.
Les familles des aviateurs, les nombreux porte-drapeaux des Associations patriotiques, les élus et l’ensemble de l’assistance se rassemblaient dans le cimetière, auprès des tombes des sept aviateurs devant lesquelles étaient apposés leurs portraits.
Au nom de la municipalité, une plaque commémorant ce 80e anniversaire a été déposée devant les tombes.

Daryl et John Van Cooten, leurs épouses, Ian Duff, son fils Mike et son petit-fils Alex.
Après avoir souhaité la bienvenue aux membres des familles des aviateurs, M. Olivier De Beule, maire du village, et notre Association ont déposés des gerbes de fleurs au pied des tombes. Après la sonnerie aux morts et le respect d’une minute de silence retentirent les hymnes nationaux de l’Australie, de Grande-Bretagne et de la France.
M. Olivier De Beule a ensuite retracé l’historique de cette mission de la nuit du 17 au 18 juin 1944, qui se déroula quelques jours seulement après le très attendu Débarquement des troupes alliées en Normandie. Il rappela les circonstances du crash ayant entrainé dans la mort les sept jeunes occupants du Lancaster qui sacrifièrent ainsi leurs vies sur le sol de France pour notre Liberté. Trois jours plus tard, après une messe à l’église, ces sept aviateurs avaient été inhumés dans le cimetière communal avec grand respect et compassion par la population du village, celle des villages voisins et de nombreux anonymes malgré la présence de l’occupant allemand.
L’ASAA-Oise a ensuite associé les autres familles de ces aviateurs qui n’avaient pu effectuer le voyage pour ce 80e anniversaire mais qui étaient présentes par le cœur et la pensée. Parmi elles, Christine Dawson, nièce du Sgt Douglas Dawson, qui avait tenu à écrire un message et qui a été lu pour l’occasion.
« J'ai assisté à plusieurs autres cérémonies de commémoration dans le passé et je suis attristée de ne pas pouvoir être avec vous aujourd'hui mais je pense à vous tous. J'espère pouvoir revenir de nouveau à l’avenir. Je suis en train d’écrire l'histoire de ma famille pour que l'on se souvienne de mon oncle Douglas que je n'ai jamais rencontré. Son histoire se doit d’être racontée à mes petits-enfants et à d'autres cousins de la jeune génération. J'ai tellement appris en me rendant à Gannes et je dois tous vous remercier pour tout ce travail de mémoire qui nous rassemble, assurant à nos proches que leur histoire ne sera jamais oubliée ».
Ian Duff a pris à son tour la parole, mentionnant qu’il se trouvait à Gannes pour la 6e fois. Sa première visite s’était déroulée en 1964. Travaillant alors temporairement à Paris, il s’était rendu à Gannes par le train. Arrivé à destination, il demanda la direction du cimetière. Un employé lui suggéra d’attendre pendant qu’il partait téléphoner. Bientôt une voiture arriva avec deux jeunes hommes, l’un étant le fils du maire. Ils se rendirent à la mairie où il rencontra Pierre Naquet, alors maire du village. Celui-ci lui l’accueillit pour un repas avant de l’emmener dans le cimetière afin qu’il puisse se recueillir sur la tombe de son oncle et des autres membres de l’équipage. Cette visite ainsi que l’accueil reçus ce jour-là l’avaient submergé d’émotion.
Ian Duff a également tenu à remercier et à exprimer toute sa gratitude envers la municipalité et la population du village qui veillent au bon entretien des sépultures et à leur fleurissement. Il était particulièrement ravi de la présence à ses côtés de son petit-fils Alex, âgé de 11 ans, qui venait à Gannes pour la première fois. Cette présence intergénérationnelle contribue à la transmission et à la préservation de la mémoire familiale.
La cérémonie s’est poursuivie à proximité du site du crash du Lancaster. En hommage aux aviateurs qui perdirent la vie en ce lieu, des fleurs ont été déposées au pied du petit mémorial qui rappelle cet événement tragique.
Cette journée émouvante s’est terminée à la mairie pour partager le verre de l’amitié offert par la municipalité.
17 août 2024
Cérémonie en mémoire de l’équipage du Lancaster LL727
Squadron 514 de la Royal Air Force
Sainte-Eusoye (Oise)
C’est au hameau de Sauveleux, à proximité du lieu du crash du Lancaster LL727, Squadron 514 de la RAF, tombé en juin 1944, qu’une cérémonie en l’honneur de son équipage a été organisée par la Région Hauts de France, la Communauté de Communes de l’Oise Picarde, Pierre Dugrosprez maire de Sainte-Eusoye et sa municipalité ainsi que l’ASAA-Oise.
Parmi les invités et la population venus assister à cette cérémonie étaient également présents Mme Mady Dorchies-Brillon, Conseillère régionale déléguée à l’inventaire du patrimoine et du devoir de mémoire, M. Eric Tribout, vice-président de la Communauté de Communes de l’Oise Picarde et M. Denis Pype, Conseiller régional et départemental ainsi que de nombreux porte-drapeaux des Associations patriotiques.
Pour cet hommage, nous avions le grand honneur d’accueillir Roland Rippingale, (un des fils du F/Sgt Eric Rippingale), et son épouse Lynn venus tout droit d’Angleterre.

A droite : Lynn et Roland Rippingale
Après quelques mots de bienvenue aux personnes présentes par M. Dugrosprez, maire du village, la cérémonie a débuté.
Le récit de la mission et le destin des huit membres de l’équipage ont été évoqués à l’ensemble de l’assistance parmi laquelle Mme Micheline Levieille-Lefèbvre, qui était âgée de 12 ans en 1944, nous faisait l’honneur de sa présence. C’est chez les parents de Micheline que le pilote canadien, Louis Greenburg, trouva refuge après avoir atterri en parachute.

Mme Micheline Lefèbvre
Les élus se sont ensuite exprimés tour à tour. Mme Dorchies a souligné tout son respect et toute son admiration envers le peuple britannique qui avait été capable de créer en plein conflit mondial une force aérienne pour défendre la liberté des pays envahis, ajoutant « cette cérémonie est la marque de la profonde amitié qui unit à jamais nos nations ».
Puis la stèle en mémoire de l’équipage a été dévoilée par les enfants du village. Les noms des huit aviateurs ont été lus. Après la minute de silence se sont enchainés les hymnes nationaux canadien, britannique et français.
Cette journée en hommage aux aviateurs de la Royal Air Force s’est terminée par le verre de l’amitié offert par la municipalité de Sainte-Eusoye.
14 avril 2011 - Visite de la famille du F/Sgt Eric G. Rippingale.
30 septembre 2023
Hommage à la famille Eckert
Noailles (Oise)
En cette journée de septembre, sous un beau soleil et une chaleur estivale, un hommage a été rendu pour saluer la mémoire de M. Robert Eckert, de Marthe, sa femme, et de sa famille.
En effet, au cours de la Seconde Guerre mondiale, cette famille prit d’énormes risques en hébergeant, pendant des périodes plus ou moins longues, de nombreux aviateurs alliés recherchés par l’ennemi. Il était donc important pour notre Association de rappeler leur engagement et leur courage face à l’occupant nazi et au régime de Vichy. Leur ferme, sise rue Mignon, servit de refuge pour de nombreux aviateurs alliés qui combattaient, souvent au prix du plus grand sacrifice, pour le retour de la Liberté dans notre pays.

Robert Eckert
Yvette Eckert, fille aînée de Robert et Marthe Eckert nous a fait le grand honneur de sa présence malgré son grand âge. Elle avait 10 ans à l’époque et garde toujours aujourd’hui en mémoire le souvenir de ces intrépides aviateurs recueillis par ses parents.
Au cours de cette belle journée, il était également formidable de compter parmi nous Glenda Gray et Jane Cooper. Leurs grands-pères, les 2nd Lt Glenn Camp et 2nd Lt Jarvis Cooper, pilote et navigateur au sein du même équipage, firent partie des aviateurs américains hébergés par la famille Eckert pendant plus d’un mois, de fin janvier à début mars 1944. Leur destin fut lié jusqu’à la fin de la guerre. Il était tout à fait exceptionnel de voir leurs deux petites-filles réunies pour la toute première fois au cours de cette journée d’hommage.

Glenda Gray et Jane Cooper
Des membres de l’Association N’Oublie Pas 44 venus avec leurs Jeeps d’époque étaient présents tout comme d’autres de l’Association Jericho 44.
La première partie de la cérémonie a donc débuté dans la cour de la ferme par la présentation des personnes présentes.
Puis l’ensemble de l’assistance s’est dirigé dans la rue afin de procéder au dévoilement de la plaque apposée sur le porche de la ferme, pavoisé pour l’occasion des drapeaux britannique français, et américain.
C’est à Jane, Glenda et Yvette, particulièrement submergée par l’émotion, qu’est revenu l’honneur de faire apparaître la plaque commémorative.

qui combattaient au sein d’unités intégrées dans la Royal Air Force.
18 noms d’aviateurs sont gravés sur la plaque mais davantage ont été hébergés chez la famille Eckert mais nous ignorons leurs noms, certains ne séjournant parfois que quelques heures.
L’assistance a ensuite été conviée à regagner la cour de la ferme pour la suite des discours.
Le rôle exemplaire de Robert Eckert et de sa famille qui hébergèrent tant d’aviateurs alliés a été longuement évoqué.
Robert Eckert avait été fait prisonnier au cours de la Campagne de France en 1940. En 1942, les Allemands décidèrent de libérer ceux qui appartenaient au Services de Santé. Robert Eckert se fit passer pour tel puis, démobilisé quelques temps après, il rentra chez lui à Noailles.
C’était la sombre période de l’Occupation. L’ennemi était omniprésent dans le bourg de Noailles. Robert Eckert, homme tranquille et discret à la silhouette robuste, avait été désigné délégué communal agricole. Toutes les semaines, un officier allemand venait à la ferme pour le rencontrer et s’occuper des réquisitions et prélèvements opérés chez les différents fermiers du secteur.
Le premier aviateur recueilli arriva un soir d’août 1943 avec André Buchon, le beau-frère de Robert Eckert. Ils étaient venus à vélo depuis Rumaisnil, dans la Somme. Cet aviateur s’avérait être le F/Sgt Ronald Dench, un pilote de chasse de la Royal Air Force. Il fut hébergé pendant environ deux mois chez la famille Eckert avant de poursuivre son évasion, parvenant à regagner l’Angleterre, via l’Espagne, en novembre 1943.

Robert Eckert, Ronald Dench et André Buchon.
Dès lors, Robert Eckert, sa femme et ses deux filles étaient plongés dans le grand bain de l’action clandestine et étaient affiliés à l’« Armée Secrète ». Un très jeune garçon d’origine juive leur fut aussi confié pendant toute la durée de la guerre afin de le protéger des persécutions.
Cette ferme de la famille Eckert va devenir un important maillon de la filière d’évasion Alsace créée dans l’Oise par Gilbert Thibault. De nombreux aviateurs tombés du ciel leur furent confiés. La ferme devint un refuge en attendant la poursuite de leur évasion sur le long chemin vers la Liberté. En ces temps de restrictions et de pénuries, il fallait trouver le moyen de les nourrir, de les vêtir, de leur trouver du tabac, de leur procurer de faux papiers d’identité et de faux certificats de travail. Les risques étaient énormes. La moindre imprudence pouvait s’avérer fatale. Les Allemands promettaient des récompenses à toute personne qui dénonçait la présence d’aviateurs.
Leurs protégés devaient rester confinés toute la journée et ne sortaient que le soir pour prendre un peu l’air. En attendant que la suite de leur évasion s’organise, ils occupaient leurs longues journées en jouant aux cartes avec les deux petites filles de la maison. Yvette se souvient particulièrement du 2nd Lt Jarvis Cooper à qui elle essayait d’apprendre quelques mots de français.
Les aviateurs arrivaient et repartaient souvent avec Pierre Chardeaux, membre du réseau Alsace, un vétérinaire de Beauvais qui possédait un laissez-passer ou bien avec Gilbert Thibault. Les départs s’effectuaient par groupes de 4 ou 5. C’était alors le moment des adieux et des remerciements en se promettant de se revoir après la Victoire. Tout se passait très vite, en moins de 10 minutes, de peur d’être pistés. Généralement les aviateurs gagnaient le secteur de Beauvais-Auneuil avant d’être convoyés à Paris. Remis ensuite à d’autres filières d’évasion, telles Comète, Bourgogne ou Shelburn, la plupart parvenaient à rejoindre l’Angleterre, via l’Espagne ou la Bretagne. D’autres furent malheureusement fait prisonniers dans les semaines qui suivirent.
Après quatre ans d’Occupation, l’heure de la Libération arriva. Dans l’immédiate après-guerre, Robert Eckert et sa famille, pour leur courageuse contribution et leur dévouement envers la cause alliée, furent justement reconnus par les gouvernements britannique, américain et français. Certains aviateurs leur rendirent visite au fil des années afin de les remercier personnellement.
Robert Eckert fut, pendant de longues années, le porte-drapeau de la section des anciens combattants de Noailles. Il est décédé en mars 1991, un an après sa femme.
La parole a ensuite été donnée à Glenda Gray, très honorée de rendre hommage à la famille Eckert en mémoire de sa bravoure, du sacrifice et de l’attention dont elle a fait preuve en hébergeant des aviateurs alliés.
A l'époque il y avait une petite fille qui s’était particulièrement liée d’amitié avec mon grand-père. Yvette Eckert, qui est parmi nous aujourd'hui, nous a parlé, à ma mère et moi, de ses souvenirs avec Glenn et du fait qu'il lui avait appris à jouer aux cartes. Quelque chose de si doux et de si normal au milieu d’une telle horreur nous a mis les larmes aux yeux lorsque nous en avons parlé. La famille Eckert a fait tout cela, sachant que cela signifiait une mort certaine aux mains des Nazis s’ils étaient surpris en train d’aider des aviateurs alliés. J’y pense souvent et j’aime penser que j’aurais été aussi courageuse et altruiste, mais on ne le sait jamais tant qu’on n’est pas dans cette situation ».
Très émue de se trouver à l’endroit même où son grand-père avait été caché, Jane Cooper a remercié la famille Eckert.
Quand je regarde le visage de mon petit garçon de deux ans, je vois mon grand-père. J’ai hâte de partager avec lui l’histoire de son arrière-grand-père, de revenir ici et lui inculquer les leçons de courage, de compassion et d’engagement que chacun ici incarne ».

De retour de captivité, en 1945, le 2nd Lt Jarvis H. Cooper entouré de la famille Eckert.
La parole est ensuite donnée à Gérard Eckert qui a remercié les personnes présentes venues honorer l’engagement de ses parents au cours de la Seconde Guerre mondiale.
« …La plaque commémorative représentera pour toujours une partie de l’histoire de Noailles sur le lieu où de nombreux aviateurs alliés, venus pour libérer la France, furent hébergés par mes parents d’août 1943 jusqu’à la Libération. En mon nom et au nom de tous les descendants, nous sommes très reconnaissants. Les personnes disparaissent mais la mémoire demeure ».
S’ensuivirent les hymnes nationaux.
Cette belle journée d’hommage s’est terminée par le partage du verre de l’amitié.

Jane et Glenda entourées de la famille Eckert


Glenda Gray, Jean-Marc Sauvage, Jane Cooper et Mickaël Eckert.