• Plage Bonaparte à Plouha (Côtes d'Armor) - Haut-lieu de la Résistance

  • Sacy-le-Grand (Oise) - Mémorial en souvenir du F/O H. H. MacKenzie (RCAF)

  • Supermarine LF Mk.Vb Spitfire EP120 - G-LFVB - (The Fighter Collection)

  • Le Cardonnois (Somme) - Stèle à la mémoire de l'équipage du Boeing B-17 #42-31325, 452nd Bomb Group

  • B-17G-85-VE 44-8846 - F-AZDX - (FTV)

 

Georges FLEURY

 

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Georges Fleury

Georges Fleury est né le 8 janvier 1890 à Caen (Calvados).

Démobilisé en 1919 après avoir combattu lors de la Grande Guerre, il vint s’établir à Rémécourt (Oise). Il reprit l’exploitation de ses beaux-parents avant de faire carrière dans l’Administration en tant que greffier de la Justice de Paix. Il fut élu maire de Rémécourt en 1920. Il le restera jusqu’en 1944.

Le 10 mai 1940, les Armées allemandes déferlaient sur la France. C’était la débâcle. En quelques semaines, la France était défaite et l’armistice était signé.  

Le 18 juin, dans son Appel émis sur les ondes de la BBC, le général de Gaulle appelait à la poursuite du combat. Georges Fleury, son épouse Rachel, ses enfants, France-Raphaëlle, Alain et Annette refusèrent la défaite et s’impliquèrent immédiatement dans le combat de l’ombre contre l’occupant.

Dès lors, Georges Fleury commença à recruter, au fil des mois, des hommes et des femmes de toutes conditions sociales, connus pour leur patriotisme afin de nuire aux intérêts allemands. Il s’employa à récupérer les armes abandonnées au cours de la débâcle et fit constituer un stock d’explosifs.

Des réunions clandestines étaient aussitôt organisées à son domicile de la rue de Mouy à Clermont (Oise). Sous le pseudonyme de “Carrière”, il organisa la distribution de tracts et de journaux clandestins, l’évasion de prisonniers français, la fabrication de faux-papiers et envisagea l’installation de postes-émetteurs avec l’aide du Lieutenant-radio de la Marine, Jean Corroyer.

En 1942, avec l’appui de médecins du secteur, Georges Fleury s’employa à soustraire les jeunes Français au Service du Travail Obligatoire (S.T.O.). Il organisa le placement des réfractaires, assura leur ravitaillement et distribua les tickets de rationnement.

Fin 1942, deux officiers de réserve, Marcel Sailly et Roland Delnef de la branche “Armée Secrète”, professeurs à l’Ecole Normale Professionnelle de Creil, contactèrent Georges Fleury. Ils lui demandèrent de travailler avec eux et de prendre une responsabilité au sein du mouvement de Résistance.

A partir d’avril 1943, Georges Fleury effectua des premières liaisons-radios avec Londres grâce à des opérateurs-radios venus d’Angleterre. Des parachutages d’armes et de matériels furent réceptionnés sur des terrains qu’il avait organisés dans la région. L’atterrissage nocturne de petits avions venus d’Angleterre permettait également l’échange de personnels et la transmission rapide de documents importants.

Tout au long de l’année 1943, des groupes armés étaient constitués dans de nombreux villages du Clermontois. Des opérations de sabotage de matériel ferroviaire étaient effectuées notamment à Clermont, Liancourt, Mouy, Saint Just-en-Chaussée et Estrées-Saint-Denis. Des sabotages du réseau téléphonique souterrain eurent lieu avec le concours de sympathisants des Ponts-et-Chaussées et des P.T.T. Des contacts, noués avec des gendarmes, permettaient d’anticiper les actes de répression de la Police allemande.

L’offensive aérienne alliée sur l’Allemagne et les territoires occupés s’intensifiait nuit et jour. Le département de l’Oise était survolé quotidiennement par d’immenses vagues de bombardiers. La défense antiaérienne et la chasse allemande ripostaient aux attaques. Des aviateurs tombaient du ciel dans notre région. Georges Fleury et sa famille hébergèrent plus d’une quinzaine d’aviateurs alliés qu’il fallait nourrir, habiller et pour lesquels il fallait établir de faux-papiers.

Alain Fleury et sa sœur France-Raphaëlle se souvenaient de quelques anecdotes.

Alain Fleury :

"…On essayait toujours d’agrémenter un peu et on faisait des plaisanteries. Parmi les aviateurs certains étaient capables de se débrouiller en français et l’un d’entre eux voulait dire quelque chose d’agréable à ma mère. Des camarades qui passaient de temps en temps lui ont appris une phrase et un jour il a dit ‘Chère Madame, je veux vous dire, on bouffe bien dans cette bicoque !’. Tout le monde s’est mis à rigoler”.

France-Raphaëlle Fleury :

“… Un jour ma mère attrapa un gros pot de gelée de cassis dans le placard et elle le mit sur la table. L’un des aviateurs, que nous surnommions ‘Big bébé’, prit le pot et hop, il le renversa dans son assiette. En deux trois mouvements, le gros pot de gelée de cassis avait disparu et tout le monde riait… 

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“Big Bébé”(Hobart C. Trigg) portant sur ses épaules Jean Bourdon*,
ami de la famille Fleury.
* Dans la nuit du 29 au 30 août 1944, Jean Bourdon , membre de la Résistance de Saint Quentin,
fut assassiné par une unité SS à Urvillers (Aisne) après avoir été horriblement mutilé. 
 

Un certain nombre de ces aviateurs provenaient ou furent remis au réseau “Alsace” dirigé et organisé par Gilbert Thibault à Auneuil. Les trois enfants de Georges Fleury se chargeaient parfois de les convoyer jusque Creil ou bien Paris. Des contacts convenus dirigeaient ensuite les évadés sur les chemins risqués menant vers la Liberté, via l’Espagne ou la Bretagne avant qu’ils puissent rejoindre l’Angleterre.

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Fin septembre 1943 chez la famille Fleury. Au premier plan : Annette Fleury et Hobart C. Trigg (assis).
Au second plan, de g. à d. : Jean Bourdon, Edward M. Daly, France-Raphaëlle Fleury, Alain Fleury,
James Lartizien, James G. Bormuth et Wendell K. McConnaha*.
Trigg, Daly, Bormuth et McConnaha étaient des aviateurs américains, membres de l'équipage de la Forteresse volante
tombée à Montiers (Oise) le 15 septembre 1943.
*Wendell K. McConnaha perdit la vie en décembre 1943 lors de la traversée des Pyrénées.  
 

En février 1944, Georges Fleury rencontrait le Commandant Fromonot qui organisait les Forces Françaises de l’Intérieur dans le département de l'Oise. Le mois suivant, 650 hommes étaient recensés et armés au sein d’une vingtaine de groupes autour de Clermont. Georges Fleury prenait alors la responsabilité du secteur Centre-Oise de l’O.C.M.

Le 6 juin 1944, les Armées alliées débarquaient sur les plages normandes. La Libération tant attendue n’était plus alors qu’une question de semaines. L’Armée allemande commençait à battre en retraite mais la répression s’accentuait.

Le 6 août 1944, Jean Corroyer, adjoint de Georges Fleury, était assassiné devant son domicile à Clermont par des Miliciens à la solde de la Gestapo. Sa femme Léonie et son fils Guy étaient arrêtés. Ils mourront en déportation. Ce jour-là, la famille Fleury échappa de justesse à l’arrestation et se réfugia chez des familles amies. Pendant ce temps Roger Folliot se chargea de faire disparaître les papiers compromettants se trouvant dans la maison de la rue de Mouy. Georges Fleury continua malgré tout à commander le secteur grâce aux officiers parachutés, aux radios, aux agents de liaison et participa à diverses actions de sabotages contre l’ennemi.

Le 18 août 1944, en gare de Vieux-Moulin et en compagnie d’un agent du secteur de Compiègne, Georges Fleury détruisit deux rames de wagons destinés à transporter vers l’Allemagne des internés du camp de Royallieu.

La Libération approchant, dans la semaine du 25 au 31 août 1944, il rassembla trois groupes fortement armés sous son commandement, sur ordre du Colonel Monturat, chef départemental.

Dans la nuit du 31 août 1944, il attaqua une batterie allemande à St Aubin-sous-Erquery. Les Allemands parvinrent à s’enfuir dans l’obscurité, laissant quatre prisonniers, 300 chevaux et un train de combat.

Le 1er septembre, après quatre années d’asservissement, la ville de Clermont était libérée par la 79e Division d’Infanterie américaine.

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Clermont, 1er septembre 1944 - Des GI’s sur la place Descuignières.

Georges Fleury fut nommé sous-préfet de Clermont dès la Libération, fonction qu’il occupera jusqu’en janvier 1948 avant de devenir Secrétaire Général de la Préfecture de Beauvais jusqu’en 1954. Il sera ensuite nommé Sous-préfet d’Argentan jusqu’en 1957.

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Clermont, 3 septembre 1944 – La République reprend ses droits.

Georges Fleury est officiellement proclamé Sous-préfet de Clermont par Yves Pérony, nouveau préfet de l’Oise.

 

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1er novembre 1944 – Georges Fleury lors d’une cérémonie en hommage à son adjoint Jean Corroyer.

 

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Le Sous-préfet Georges Fleury

Cet homme, aux grandes qualités humaines, fut une grande figure de la Résistance dans le département de l’Oise et un grand serviteur de l’Etat. Georges Fleury s’est éteint en août 1959.

Croix de Guerre 1914-1918

Croix de Guerre 1939-1945 avec Palme

Officier de la Légion d’Honneur

Médaille de la Résistance

Officier des Palmes Académiques

Titulaire de plusieurs distinctions alliées dont la Medal of Freedom

 

Roger FOLLIOT, alias “Titou”

 

 
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Roger Folliot est né le 15 novembre 1925 à Hermes (Oise). Son enfance se déroule ensuite à Senlis.

De 1937 à 1942, il vient suivre ses études au Collège de Clermont (Oise) où il fait connaissance d’Alain Fleury. Immédiatement, une grande complicité et une forte amitié nait entre les deux jeunes étudiants. En juin 1940, ils éprouvent d’emblée le même refus de la soumission à la défaite. “Titou” est encouragé dans cette attitude par l’exemple de son oncle, le Capitaine Raphaël Folliot qui, en juin 1940, entraine un bataillon complet du Liban à la Palestine sous autorité anglaise. (Le Capitaine Raphaël Folliot fut condamné à mort par le régime de Vichy. Il fut l'un des premiers Compagnons de la Libération).

En 1942, en pleine Occupation, Roger Folliot part poursuivre ses études au Lycée Louis-le-Grand à Paris.

En septembre 1943, alors qu’il n’a pas encore 18 ans, il est incorporé au sein du groupe de Résistance O.C.M. (Organisation Civile et Militaire) du secteur Centre-Oise, basé à Clermont et commandé par le Capitaine Georges Fleury, alias “Carrière”, le père de son ami Alain.

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Roger “Titou” Folliot

Dès lors, Roger “Titou” Folliot remplit les missions qui lui sont confiées, à commencer par la mise en sécurité de plusieurs aviateurs alliés tombés dans le secteur de Saint-Leu d’Esserent. Il est notamment chargé d’effectuer des missions de liaison régulières avec les groupes de Résistance de Senlis, de Creil, de Rochy-Condé, se rendant aussi occasionnellement à Paris pour assurer des contacts avec les réseaux spécialisés d’évasion d’aviateurs.

Au printemps 1944, “Titou”, avec l’aide se son père, André Folliot, russophone, est chargé des rapports avec un groupe de prisonniers de guerre russes évadés, basés à Mérard, près de Mouy. Il l’équipe d’armes américaines reçues lors d’un parachutage.

GeorgesFleury2A partir du mois de mai jusqu’en septembre 1944, “Titou” réside dans la maison de la famille Fleury à Clermont. Il côtoie, de façon plus ou moins continue, “Jacky” (Jacky du Pac) des Services Secrets britanniques, Roger Camous, alias “Le Raton”, officier du Service de Renseignement Air et un homme assez fanfaron, Robert Frotté alias “Breton”, responsable pour l’Oise du Bureau des Opérations Aériennes. Le B.O.A., lié au B.C.R.A. (Bureau Central de Renseignements et d'Action) créé par la France Libre à Londres, homologuait et contrôlait l’utilisation de dizaines de terrains de parachutage proposés par les groupes de Résistance locaux pour la plupart.

Titou” fait partie du petit groupe de commandement constitué autour de lui par Georges Fleury. Avec Alain, ils sont les agents de liaison personnels de celui-ci. Les liaisons concernent un assez grand nombre de personnes : le Colonel Fromonot (Monturat), responsable de la Résistance dans l’Oise, le Capitaine de Montalambert au Génie Rural, plusieurs chefs de la vingtaine de groupes dépendant du Secteur-Centre de l’O.C.M. dirigé par Georges Fleury, plusieurs représentants d’autres mouvements de Résistance, entre autres l’ancien député Jean Biondi de Libération-Nord, Edouard du F.N.  

En tant qu’agent du groupe de protection, “Titou” participe à différentes opérations de parachutage à Fouilleuse, Cernoy et Francières, se chargeant ensuite de transporter puis de dissimuler au plus vite les armes et le matériel réceptionnés. Il assure parfois le transport des armes vers les différents groupes de la région, allant même livrer à bicyclette une mitraillette Sten pour le groupe de Senlis, dirigé par André Decatoire, qui en était dépourvu. Il transporte l’émetteur-radio du groupe de Creil à Cauffry.  

Il prend également part à une opération Pick-up effectuée par avion Lysander de la Royal Air Force, près d’Estrées-Saint-Denis, dans la nuit du 2 au 3 juin 1944.

Le 26 juin 1944, alors qu’il se trouve chez ses parents à Senlis, il se rend à Eve avec Jules Fossiez afin d’aller récupérer un pilote de chasse américain, le 2nd Lt Heyward C. Spinks dont le “Mustang” avait dû faire un atterrissage forcé. Un peu plus tard, “Titou” et Alain Fleury font le repérage d’un aviateur américain tombé près de Rochy-Condé.  

A Clermont, le 6 août 1944, lors du raid de la Gestapo et de la Milice contre les domiciles de George Fleury et de son adjoint Jean Corroyer, ce dernier est assassiné. Sa femme et son fils sont arrêtés et seront déportés sans retour. La “maison” Fleury est forcée, un peu saccagée mais personne n’y est trouvé… En effet, toute la famille Fleury se trouve à Rémécourt. Elle parvient à s’enfuir et à se réfugier chez les amis Doisy. Le dernier occupant, “Titou”, a fermé et quitté la maison un peu avant la nuit. Ici, au moins, le pire est évité. “Titou” gagne Senlis.

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Dès lors, la plus grande prudence est requise car la maison des Fleury est probablement sous surveillance. Pourtant cette maison renferme des secrets qu’il faut mettre en lieu sûr. C’est à Roger Folliot qu’il incombe de récupérer, malgré tous les risques, les documents importants. Cependant “Titou” se heurte à l’opposition résolue d’une jeune fille, Eliane (plus tard son épouse), qui le trouve beaucoup trop repérable. C’est elle qui, avec l’aide d’un de leurs camarades, Jean Lamirand, procède à la “récupération” des documents cachés dans la maison Fleury qu’elle connait bien.

Un peu plus tard, en août 1944, Georges Fleury, s’étant éloigné dans le nord du département, cherche à reprendre contact avec les Groupes de son Secteur. Sa fille, France-Raphaëlle, parvient à rencontrer “Titou” à Senlis. Elle lui transmet les ordres destinés aux chefs de Groupes. La mise en action opérationnelle du Secteur Centre se réalise ainsi, sous le contrôle de son chef.

Dans les derniers jours d’août, “Titou” fait sa jonction avec Georges Fleury et Alain. Avec ce dernier, il participe à un dernier parachutage. Ensuite, les groupes armés du Secteur Centre se disposent au nord de Clermont. Après un accrochage avec une batterie d’artillerie allemande dans la nuit du 31 août, Georges Fleury envoie “Titou” en reconnaissance. Après le rapport de celui-ci, la marche finale sur Clermont est lancée puis ce fut la Libération.

Après la guerre, Roger Folliot reprend ses études à la Sorbonne et obtient une licence complète ès-sciences. Agrégé de l’Université, il occupe la fonction de chef de travaux à la Faculté des Sciences de Rennes, en Bretagne.

Roger “Titou” Folliot poursuivra une carrière exemplaire au service de la Science (biologie générale, biologie cellulaire, génétique).

 - Docteur d’Etat ès-sciences

- Professeur des Universités

- Professeur associé à l’Université de Montréal (Canada).

- Directeur de l’Unité de Recherche associée au C.N.R.S. “Biologie Cellulaire et Reproduction

- Conseiller scientifique (Biologie) de la Direction de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche

- Membre du Comité National du C.N.R.S.

- Examinateur en chef du Baccalauréat International (Genève)

Ouvrages scientifiques publiés :

- (Presses Universitaires de France) : “Biologie Cellulaire” et “Les Bases Chimiques de la Biologie Cellulaire

- (Pôle Européen d’Enseignement) : “Accéder aux grands concepts de la Génétique

- (Unesco) : “Les Etudes Supérieures dans le Monde” – en collaboration avec le Professeur de Grandpré (Québec)

 

Chevalier de la Légion d’Honneur

Croix de Guerre 1939-1945 avec Etoile de Bronze

 Commandeur dans l’Ordre des Palmes Académiques

 

 

Docteur Edmond CAILLARD

                                                                                                                                                                                      
 
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EdmondCaillard Edmond Caillard est né le 5 avril 1912 à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie.

Au cours de son adolescence, il étudia au collège La Pérouse de Nouméa puis se rendit en France métropolitaine pour poursuivre ses études supérieures. Après son service militaire à Toulon en 1934, il entra à la Faculté de médecine.
Il fut diplômé de médecine coloniale en mai 1939.

Le 26 août 1939, il était mobilisé au 24e Régiment d'Infanterie Coloniale en tant que médecin.
En avril 1940, il se maria avec Suzanne Mangeol, originaire de Plombières, dans les Vosges.
Quatre enfants naîtront successivement en 1941, 1943, 1944 et 1948.

Promu sous-lieutenant en mai 1940, son régiment participa aux combats de mai-juin 1940 dans la Somme. Lors de la débâcle, Edmond Caillard fut fait prisonnier par les Allemands mais parvint à s'évader. Il fut démobilisé à la fin du mois d'août 1940.

Son ami, le docteur Lachèze, ne souhaitait pas revenir en Zone occupée et exercer à Saint Just-en-Chaussée. A partir de 1941, le Dr Edmond Caillard reprit son cabinet situé boulevard Valentin Haüy.

Bien que nouveau venu dans la ville, ses grandes qualités de médecin et son dévouement lui valurent rapidement une nombreuse clientèle.

Sa rapide intégration lui permit également de nouer des contacts avec des résistants du secteur qui avaient choisi de continuer le combat dans l'ombre tels Georges Jauneau, Jean Crouet, son confrère le Dr Delignon, etc...

 

A partir de 1943, les raids de bombardement contre l'ennemi s'intensifiaient. De nombreuses formations d'appareils alliés survolaient quotidiennement la région, de jour comme de nuit, à destination du Reich. Harcelés par la chasse allemande ou pris dans le feu des canons antiaériens, les bombardiers subissaient des pertes et tombaient dans la région. De nombreux aviateurs ayant réussi à se parachuter étaient recueillis par la population locale.

St Just-en-Chaussée - La Simca 5 du Dr Caillard Dans la région de Saint Just-en-Chaussée, le Dr Caillard fut souvent sollicité afin de venir soigner les aviateurs blessés. A bord de sa Simca 8 et muni d'une autorisation de circuler, il sillonnait la région de jour comme de nuit, transportait et répartissait provisoirement les aviateurs dans des familles patriotes et de confiance en attendant qu'ils puissent rejoindre les filières d'évasion organisées. Les blessés les plus graves étaient transportés dans des hôpitaux, notamment à Creil, en connivence du Dr Debray.

A maintes reprises, avec la complicité de son épouse, il hébergea des aviateurs, leur fournissant des vêtements civils.

Le Dr Caillard fut arrêté une fois avec un aviateur en uniforme à bord de sa voiture. Les Allemands étaient si heureux de capturer le malheureux aviateur qu'ils le laissèrent partir librement. Son statut de médecin lui permit d'avoir la chance de s'en tirer.

 

Dans la nuit du 27 au 28 août 1944, ayant décollé du camp de Fairford, en Angleterre, six commandos franco-belges appartenant au Special Air Service (SAS) étaient parachutés dans le secteur de St Just-en-Chaussée. L'opération "Benson", commandée par le capitaine Kirschen, était destinée à renseigner le SHAEF (Commandement Suprême des Forces Expéditionnaires Alliées) sur le plan de repli des troupes allemandes vers la Somme et le Nord de la France ainsi que de repérer les batteries anti-aériennes ennemies. En raison d'un orage, le F/O Davidson, pilote australien du Stirling, avait largué par erreur les six hommes du SAS à environ 10 km à l'ouest de l'endroit convenu. Quatre se blessaient légèrement à l'atterrissage. Aux abords de Valescourt, ils se dissimulèrent dans un bosquet jusque dans la soirée du 28 avant d'être conduit par un résistant vers une grange de la ferme de la Folie où ils se cachèrent dans une cave.

Lieuvillers - Ferme de La Folie Le lendemain, le Dr Caillard qui avait été avisé, arriva à moto et vint soigner les blessés. Le capitaine Kirschen lui expliqua le but de leur mission. A la grande surprise des membres du SAS, le docteur sortit de sa poche un document extraordinaire: le relevé des positions de toutes les divisions allemandes sur la Somme.

La veille, au carrefour de Saint Just-en-Chaussée, le Dr Caillard avait observé un commandant allemand qui dirigeait la circulation militaire à l'aide d'une carte. Assoiffé, le commandant était entré dans un café et avait posé sa carte sur une table. Profitant de son inattention, le Dr Caillard avait pu la recopier sur une petite feuille de papier.

Ces informations de la plus haute importance pour la suite du conflit furent transmises le jour-même à Londres par message codé.

Le 31 août 1944, la ville de Saint Just-en-Chaussée était libérée par les armées alliées.

Le Dr Caillard vint en aide à environ 87 aviateurs alliés, Américains pour la plupart, dans la région de Saint Just-en-Chaussée.

 

 

Après la Libération, le Dr Caillard devint 1er adjoint du maire, le Dr Delignon. Il occupa cette fonction d'octobre 1944 à août 1946.

St Just-en-Chaussée - La famille Caillard et leurs amis en 1945
A droite, le Dr Caillard
 

En novembre 1946, les liaisons maritimes étant rétablies, le Dr Caillard et sa famille décidèrent de rentrer en Nouvelle-Calédonie.

En 1947, à Nouméa, il contribua, avec trois autres médecins, à la fondation de la Polyclinique de l'Anse Vata, installée dans les bâtiments préfabriqués d'un ancien hôpital construit par les Américains lors de la guerre du Pacifique. Il ouvrit le premier laboratoire d'analyse privée et il fut le premier à faire des radiographies et des radioscopies, toujours dans le privé. 

Gaulliste social, Edmond Caillard se lança dans la politique et adhéra au Parti des "Républicains Sociaux" de Roger Frey, ancien résistant et longtemps ministre de l'Intérieur du Général de Gaulle. Il fut notamment élu à l'Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie de 1957 à 1962.

En 1967, il cessa ses actions politiques, continuant ses consultations à son cabinet ou à la Polyclinique qu'il continua d'administrer.
Le Dr Caillard se passionnait aussi pour l'astronomie. A la fin des années 50, il avait fait construire un observatoire dans sa propriété.

Le Dr Edmond Caillard est décédé le 16 juin 1991 à Nouméa à l'âge de 79 ans.

St Just-en-Chaussée - Maison du Dr Caillard     St Just-en-Chaussée - Maison du Dr Caillard
                                                                      La maison du Dr Caillard, rue Valentin Haüy, à Saint Just-en-Chaussée

 

En août 2002, en Nouvelle-Calédonie, un timbre était édité afin de lui rendre hommage.
Une rond-point porte son nom dans la ville du Mont-Dore (Nouvelle-Calédonie) ainsi qu'une petite rue à Nouméa.

Le Dr Edmond Caillard était titulaire de nombreuses décorations américaines, britanniques et françaises :
    - Officier de la Légion d'Honneur
    - Croix de Guerre 1939-1945
    - Médaille de la Résistance
    - Croix du Combattant Volontaire de la Résistance
    - Medal of Freedom avec palme de bronze
    - King's Medal for Courage in the Cause of Freedom

        

Lieuvillers - Les enfants du Dr Caillard à la stèle Benson
- Mars 2010 -
Les enfants du Dr Caillard devant la stèle commémorative inaugurée le 30 août 1997
rappelant l'Opération "Benson".
 
Le 20 juin 2015, à Saint Just-en-Chaussée, une cérémonie rendait hommage au Dr Caillard.
 
Sources : famille du Dr Caillard
             : "Six amis viendront ce soir" de Gilbert-Sadi Kirschen - 1946 - (Nicholson & Watson)
 

 

Aide aux aviateurs alliés

 

à Saint-Leu-d'Esserent (Oise)

 

 au cours de la Seconde Guerre mondiale

                                                                                                           

 

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Par Jean-Philippe Matthieu :

 

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, des Lupoviciennes et Lupoviciens ont apporté leur aide à des aviateurs américains au péril de leur vie. Cette aide pouvait être "organisée" comme celle dont bénéficièrent :

- le S/Sgt Clifford G. Golke et le Sgt Cletus S. Hard, membres de l'équipage de la Forteresse volante “Lucky Strike”, 95th Bomb Group, 334th Bomb Squadron, tombée le 10 avril 1944 à Ercuis (Oise).

- le 1st Lt Rex P. Hjelm, pilote de P-38 "Lightning", 55th Fighter Group, 343rd Fighter Squadron, tombé le 11 juin 1944 à Bailleul-le-Soc (Oise).

- le 2nd Lt Edward I. Peterson, copilote de la Forteresse volante “Ensign Mary”, 379th Bomb Group, 526th Bomb Squadron, tombée le 16 juin 1944 à Pontpoint (Oise) qui fut amené depuis Senlis par M. René Charpentier.

cletus hard   REX et EDWARD 1944 st leu
                            Sgt Cletus S. HARD                                                  Le 1st Lt Rex P. HJELM et le 2nd Lt Edward I. PETERSON
       Il séjourna à Saint-Leu-d'Esserent en compagnie                                                hébergés à Saint-Leu-d'Esserent.                                                                du S/Sgt Clifford G. GOLKE en mai 1944.
   Chaque aviateur allié possédait un jeu de trois photos
     d'identité, habillé en civil, facilitant l'établissement
                                 de faux-papiers.
 

L'aide reposait sur M. André Cochet qui s'occupait des transports et ramenait des vraies-fausses cartes d'identité de la Préfecture de Beauvais. Celles-ci étaient remplies à Saint-Leu-d'Esserent par Mr Lucien Baudoin, secrétaire de mairie. Le ravitaillement était assuré par Mme Marcelle Cochet et Mme Charlotte Bachimont (après la Libération, elle sera la 1ère femme Conseillère Municipale de Saint-Leu puis maire en mai 1946). L'hébergement était pris en charge par les sœurs Alice et Marcelle Barbier.

lucien baudoin secretaire de mairie NB Copie       Fausse carte de Hjelm 
                                                                     Mr Lucien BAUDOIN                                           Fausse carte d'identité                                                                                                                                                                                              du 1st Lt Rex P. HJELM                                                                
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Début juillet 1944 - Photo prise dans le jardin des sœurs BARBIER à Saint-Leu-d'Esserent. (Place de la Mairie).

De gauche à droite: Marcelle BARBIER, Rex P. HJELM, André COCHET, Edward I. PETERSON et Alice BARBIER.

            Juillet 44 rex hjelm andre cochet de st leu et edward peterson hebergs chez les soeurs barbier place de la mairie. photo famille rivalier.cochet
            Rex P. HJELM, André COCHET et Edward I. PETERSON.

Photo prise avec l'appareil "Kodak" familial par Mme Marcelle COCHET.

 

Les hasards de la vie ont permis à d'autres habitants de Saint-Leu-d'Esserent d'apporter une aide "spontanée" à des aviateurs alliés comme ce fût le cas pour M. et Mme Henri Lefebvre. En se rendant aux morilles, ils trouvèrent un parachutiste dans les bois, ils cachèrent son parachute (qui fût récupéré quelque temps plus tard et servit à confectionner des vêtements) puis contactèrent l'abbé Chrétien qui prit cet aviateur inconnu en charge. Mme Jacqueline Simon, leur fille, couturière, retailla un costume appartenant à son mari afin d'offrir à cet aviateur un habit civil.

Ces faits ne sont pas exhaustifs. Durant cette période, d'autres cas similaires ont certainement eu lieu sans être connus.

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 Paire de sous-gants offerte, par un aviateur américain inconnu, à Mr et Mme Henri LEFEBVRE pour les remercier de leur aide.

 

Témoignage de Mme Marcelle Cochet recueilli par Mme Paulette Formaux en mai 1986 :

"Monsieur Cochet détenait un ‘Ausweis’ qui lui permettait de circuler pour le ravitaillement. Marcel Coëne et Mr Boulanger, deux responsables de la Résistance, sont venus lui demander de prendre deux aviateurs américains, à Neuilly-en-Thelle1. Les logeurs étaient dénoncés2. Ils furent conduits dans une maison de carrière à Maysel et ensuite ramenés chez Melle Barbier à Saint-Leu-d’Esserent.
Mr. et Mme Cochet, tout comme Mme Bachimont fournissaient de la nourriture.
La sœur de "Pierrot"3 (Roland Jacques de Saint Vaast-les-Mello) convoyait les Américains jusqu'au terrain des Aigles à Chantilly. Ensuite le départ s'effectuait par le train jusqu'en Espagne.
Mr Picot, contrôleur des Contributions Directes de Chantilly, s'occupait des départs.
Mr Cochet rapportait des cartes d'identité de la Préfecture et M. Baudoin, secrétaire de Mairie, et les remplissait.
A l'occasion d'un de ses voyages à Beauvais, on lui confia la mission de prévenir le notaire d'Auneuil (Gilbert Thibault), qui était menacé suite à une dénonciation. Celui-ci fut ramené à Beauvais entre deux piles de bois dans la camionnette de Mr. Cochet.

Mr Cochet refusait de sortir la nuit. C'est au cours d'un transport de deux Américains que le Docteur Andrieu fut pris sur le plateau de Cramoisy. "André", de Ercuis, et un autre résistant réussirent à s'évader. Le Docteur Andrieu fût déporté à Dachau et n'est pas rentré...".

 
1 Il s'agit de Clifford G. Gollke et de Cletus S. Hard dont l’appareil était tombé à Ercuis.
2 Les logeurs sont Mr Henri Viet et son épouse qui habitaient à Saint Vaast-les-Mello.

3 Pierrette Henri (née Jacques), alias “Mado” dans la Résistance.

Le Dr Charles Andrieu fut arrêté le 8 juillet 1944. Le 18 août 1944, il est déporté au départ de Compiègne vers le camp de concentration de Buchenwald puis celui de Neu-Stassfurt. Il décède le 21 mars 1945.

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André Cochet
 
 
 
Sources :
Témoignages de : - Mme Jacqueline Simon (née Lefèbvre)
                             - Mme Michèle Rivalier (née Cochet)
Fonds local de la médiathèque Jean Moulin : travaux de Mme Paulette Formaux

Documents de la famille Hjelm, U.S.A.


Gilbert THIBAULT,

Henri MAIGRET

 

Le réseau d'évasion "ALSACE"

                          

                                                                                                                                                                               
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Gilbert Thibault était né le 30 juillet 1912 à Rouen (Seine-Maritime).
Adolescent, il fréquenta le Lycée Félix Faure de Beauvais lors de l’année scolaire 1927/1928 puis l’Institution du Saint-Esprit en 1929/1930.
Diplômé d’une Capacité en Droit et parlant l’anglais, il travailla de 1930 à 1932, comme clerc de notaire, chez Maitre Recullet à Beauvais.
 
Appelé à effectuer son service militaire en 1933, Gilbert Thibault fut incorporé comme soldat de 2e classe à la Compagnie du Train-Auto n°2 à Amiens (Somme).
En 1934 et 1935, il fut employé comme greffier au Tribunal Civil de Beauvais.
En 1936, il travailla chez Maitre Patin, huissier à Lille, comme Principal clerc.
En octobre 1937, il revint dans l’Oise et s’établissait en tant qu’huissier à Auneuil (Oise).

Gilbert Thibault

A la déclaration de guerre en 1939, Gilbert Thibault fut mobilisé comme sous-lieutenant au Quartier-Général de la 352e Compagnie Train-Auto.

A partir du 10 mai 1940, ce fut l'attaque brutale de l'Armée allemande. Le 20 juin, son unité fut encerclée par l'ennemi. Thibault était fait prisonnier le 26 juin. Envoyé à l'Hôtel des Thermes de Bagnoles-de-l'Orne transformé en Oflag, il parvint à s'en évader le 14 août. Il rejoignit alors la Régulatrice Routière de Châteauroux.

En février 1941, continuant son service actif, Thibault réussissait à rejoindre l'Afrique du Nord après avoir traversé les Pyrénées. Affecté à la 352e Compagnie du Train-Auto à Rabat (Maroc), il fut promu Lieutenant le 25 septembre.

Un an plus tard, le 25 septembre 1942, il obtint sa mutation dans la Cavalerie.

Il retourna en France en octobre 1942 à l'occasion d'une permission à la fin de laquelle il tenta, en vain, de regagner l'Espagne puis le Maroc. Le Débarquement allié en Afrique du Nord du 8 novembre 1942 bouleversa ses plans.

Quelques mois plus tard, l'un de ses camarades de régiment se trouvant à Cambo-les-Bains l'informa qu'il avait trouvé un moyen de rejoindre l'Afrique du Nord via le Pays Basque et l'Espagne avec l'aide d'un guide et passeur, Ruffino Jauréguy, un ancien combattant antifranquiste, réfugié politique en France après la guerre civile espagnole.

En mars 1943, profitant de sa propre expérience et désirant continuer la lutte, Gilbert Thibault envisagea alors de créer la ligne "Alsace", une filière d'évasion permettant aux soldats, officiers et autres jeunes gens de rejoindre, via l'Espagne, les Forces Françaises Libres en Afrique du Nord ou en Angleterre. Le franchissement du massif du Mondarrain avant d’atteindre Ainhoa puis l’Espagne était parfois périlleux en raison des conditions climatiques et de la surveillance de la frontière exercée par l’Armée allemande. Gilbert Thibault espérait malgré tout bénéficier lui-même de ce passage en dernier lieu.

Grâce aux contacts établis à Paris avec Hélène Jullien, Yvonne Deplanche, Odette Leguillier et son cousin André Bureau, la filière commença à fonctionner.

En août 1943, Gilbert Thibault travailla pour l'OCM, en particulier avec Charles Verny (fondateur de l'OCM des Jeunes) qui avait pour rôle, entre autres, le financement et la fourniture de faux-papiers aux évadés. Il rencontra André Perruche-Joubert, alias "A-6", qui était sous les ordres du Colonel Pierre Malaisé représentant à Madrid du CFLN (Comité Français de Libération Nationale) d'Alger.
"A-6" lui proposa alors de rester en France, de porter tous ses efforts sur la ligne "Alsace" et d'y faire passer des aviateurs alliés ainsi que tout renseignement pouvant servir la cause alliée. Thibault accepta.

Aucun crédit ne lui étant alloué pour le fonctionnement de la ligne, Thibault se tourna vers les instances anglo-saxonnes qui lui octroyèrent un crédit illimité.

Des divergences apparurent rapidement entre Charles Verny et "A-6". Verny demanda alors à Thibault de cesser ses contacts avec "A-6" sous peine de se voir supprimer toute ressource en provenance de l'OCM.
Thibault refusa, se considérant sous la coupe des autorités de Madrid.
Il envoya Odette Leguillier en Espagne, la chargeant d'obtenir des fonds et d'établir des relais jusque Madrid. Elle réussissait cette mission, revint avec l'argent mais se fit arrêter à 300 mètres de la frontière. Refoulée en Espagne, elle parvint à rejoindre le Maroc.
Elle s'engagea plus tard comme infirmière au sein de la 1ère Armée française dans la Campagne d'Italie.

Bien que privé d'argent par Verny, Thibault restait convaincu de l'action qu'il pouvait mener.

Sous le pseudonyme de "Zéphyrin", il mit sur pied, à Auneuil, sa filière d'évasion consistant à collecter, contrôler, héberger, nourrir, vêtir, fournir en faux-papiers et convoyer les aviateurs. Il s'appuya pour cela sur un tissu de ramifications auprès de chefs de secteurs du département de l'Oise. Par manque de moyens financiers et sans relais efficaces menant vers la frontière espagnole, Thibault orienta un certain nombre d'évadés vers la filière Comète puis plus tard vers Shelburn.

Gilbert Thibault

En 1942, à la demande du IIIe Reich, le Service du Travail Obligatoire (STO) avait été instauré par le gouvernement de Vichy. A partir de février 1943, tous les jeunes Français nés en 1920, 1921 et 1922 étaient recrutés de force, sous peine de sanctions, afin d'aller travailler en Allemagne. Les ''réfractaires'' se cachèrent et entrèrent dans la clandestinité, rejoignant les rangs de la Résistance ou les Maquis.

En novembre 1943, Henri Maigret, jeune instituteur de 20 ans exerçant à Blacourt, tenta lui aussi d'échapper au STO. Il demanda à Gilbert Thibault de pouvoir bénéficier de la ligne d'évasion avec son ami Robert Fontaine. Tous deux avaient la ferme intention d'atteindre l'Afrique du Nord et de rallier les Forces Françaises Libres. Au mois de septembre précédent, Henri Maigret avait rencontré pour la première fois Gilbert Thibault afin de faire évacuer deux aviateurs américains parachutés au dessus de Blacourt (August Winters et Douglas G. Wright) qu'il avait personnellement aidés. A partir de cette période, de nombreux aviateurs commençaient à tomber du ciel. Le département de l'Oise se trouvait dans une zone de passage des bombardiers alliés qui se rendaient ou rentraient de missions au dessus de l'Allemagne.

Pendant trois mois, des vagues d'arrestations s'étaient multipliées à Paris. Le départ de Maigret et Fontaine s'avérait impossible. A leur grand désespoir, ils devaient attendre.

Leur départ fut enfin fixé au 17 février 1944. Ce jour-là, à Paris, Henri Maigret et Robert Fontaine avaient rendez-vous avec Gilbert Thibault à la station de métro Notre-Dame-de-Lorette. Mais Thibault ne se présenta pas à l'heure et à l'endroit convenu.

Après avoir longuement attendu, Maigret se souvenait alors d'une adresse et décida de s'y rendre, son ami Fontaine restant près de la station de métro, espérant toujours l'arrivée de Thibault. Parvenu rue de Clichy, Maigret gravissait les escaliers et frappa en vain à la porte d'un appartement. De retour au bas de l'immeuble, la concierge, mal à l'aise, lui fit comprendre qu'il fallait déguerpir.

La veille, 16 février, dans ce même immeuble de la rue de Clichy, Gilbert Thibault avait échappé de peu à une souricière tendue par la Gestapo. Par miracle, il était parvenu à s'enfuir en dévalant les escaliers sous le feu d'un policier allemand. Une balle l'avait cependant atteint et lui avait fracturé l'auriculaire droit. Ce jour-là, Eva De Graff (de la ligne d’évasion Dutch-Paris), Julien Perny (agent Shelburn) et André Bureau (agent de liaison de Thibault) furent parmi les personnes arrêtées.

Henri Maigret comprit, par la suite, combien il avait été chanceux de ne pas tomber dans le piège, simplement parce qu'il s'était trompé d'escalier et d'appartement.

Ne regagnant pas immédiatement Auneuil, sachant qu'il était recherché et traqué, Thibault fut contraint de rester dans l'ombre.
Suite à cette chaude alerte, les rêves de Maigret et Fontaine de rejoindre l'Afrique du Nord s'effondraient (Fontaine y parviendra tout de même plus tard).

Henri Maigret "Zéphyrin" proposa alors à Henri Maigret d'entrer dans la clandestinité et de devenir son adjoint en assurant les liaisons et les convoyages. Maigret changea d'identité, devint "Albert Wuillance" avec la profession de "courtier en assurances". "Albert" lui valut bientôt le surnom de "Bébert".

Vêtu de sa veste en cuir, chevauchant sa moto Gnome-et-Rhône et risquant sa vie à chaque instant, il parcourait la campagne afin de visiter les aviateurs alliés en attente de départ. Disséminés dans les différents lieux d'hébergements, il s'occupait de les ravitailler en cigarettes et de leur fournir de fausses identités.

Habituellement, les aviateurs étaient conduits par petits groupes à Paris, soit en voiture ou soit en autocar. A partir de février 1944, devant le nombre croissant d'aviateurs à faire évacuer, Thibault organisa leur transfert par train au départ des gares de Chaumont-en-Vexin, Beauvais ou Rochy-Condé. Le trajet vers Paris s'effectuait bien souvent au milieu des soldats allemands. Parfois, des aviateurs étaient aussi remis à des convoyeurs venus de Paris. Pris ensuite en charge par la filière d'évasion Shelburn, transitant quelques heures ou quelques jours à Paris, la plupart des évadés était convoyée vers la Bretagne. A Plouha, ils embarquaient, lors d'opérations convenues et par nuit noire, à bord d'une corvette de la Royal Navy, à destination de l'Angleterre.

En mai, deux autres groupes d'évadés furent emmenés jusqu'aux gares de Saint-Ouen et de Pontoise. Il était décidé d'éviter Paris. Une autre fois, un groupe fut conduit à l'hospice d'Argenteuil. A compter de cette période, les aviateurs furent dirigés vers le camp de la forêt de Fréteval, près de Châteaudun. Le Débarquement devenant imminent, les Alliés bombardaient les voies de communications et paralysaient le réseau ferroviaire. Il n'était plus question de prendre de risques en convoyant les aviateurs à travers la France.

Malgré des arrestations, essentiellement à Paris, le réseau "Alsace" continua de fonctionner jusqu'à la Libération.

Dans l'Oise, à partir du mois d'août, n'ayant pu être évacués depuis deux mois, les aviateurs s'accumulaient chez les hébergeurs de la région. Gilbert Thibault imagina alors la construction d'un camp rudimentaire dans un bois très touffu et difficile d'accès appartenant à Mme Ravel, près de la commune de Porcheux, au sud de Beauvais.

Attendant l'arrivée imminente des troupes alliées, une vingtaine d'aviateurs y logèrent dans des cabanes aux toits de tôles recouverts de feuillages. Ils dormaient sur de la paille, étant approvisionnés et nourris par des fermiers des alentours.
Le 30 août 1944, l'arrivée d'une colonne blindée britannique libéra le secteur, mettant un terme aux quatre années d'Occupation et à l'activité du réseau "Alsace".

Le réseau Alsace permit l'évasion d’environ 150 Français par la frontière espagnole. Environ 120 aviateurs alliés tombés pour la plupart dans le département de l'Oise ou venant des départements limitrophes bénéficièrent de l’aide du réseau avant d’être remis à d’autres filières d’évasion.

Les gouvernements alliés reconnurent après la guerre le rôle prépondérant joué par le réseau "Alsace" dans l'évacuation des aviateurs alliés. De multiples distinctions britanniques et américaines furent décernées à Gilbert Thibault, à Henri Maigret et aux membres du réseau.

Quelques jours après la Libération, Gilbert Thibault quitta Auneuil et demanda à reprendre du service dans l’Armée en tant que Lieutenant de Réserve dans la Cavalerie. Il rejoignit le front de l'Atlantique jusqu'à la fin des hostilités. 

En février 1953, Gilbert Thibault partit en Indochine où il commanda une Compagnie de transport. Il se distingua particulièrement en janvier 1954 en parvenant à acheminer trois bataillons sous le feu de l’ennemi. Cette action lui valut l’attribution de la Croix de Guerre des T.O.E avec Etoile d’Argent.

Gilbert Thibault décéda le 14 mai 1955 à Paris. Ses obsèques eurent lieu au Val-de-Grâce à Paris.

 
En décembre 1944, Henri Maigret s'engagea dans l'Armée Française. Il servit au Maroc puis en Allemagne. Démobilisé en mars 1946, il reprit son métier d'instituteur dans la région de Beauvais. Peu attiré par les honneurs, il assistait rarement aux cérémonies commémoratives. En 1962, il partit enseigner au titre de la coopération au Maroc puis en Algérie jusqu'en 1976. Revenu en France, il termina sa carrière d'enseignant à Istres.
 
Bien des années après la guerre, il eut aussi la satisfaction de correspondre et de revoir à plusieurs reprises des aviateurs britanniques, américains ou australiens revenus dans la région afin de remercier personnellement leurs sauveteurs.
 
Retraité, c'est en 1977 qu'il décida de tirer de l'oubli les actions menées par le réseau "Alsace". Il rassembla des documents et recueillit les témoignages et les souvenirs de ceux qu'il avait côtoyés en 1943/1944.
Son livre, "Un réseau d'évasion dans l'Oise à Auneuil" était publié en 1994.
Henri Maigret décéda le 10 octobre 2007.

 

Le nom du réseau "Alsace" est gravée sur la stèle de granit dominant la plage "Bonaparte" à Plouha, perpétuant le souvenir de la filière d'évasion créée par Gilbert Thibault.

Plouha - La stèle

Le 8 mai 2022 à Auneuil, une cérémonie a été organisée à la mémoire de Gilbert Thibault. 

 

Sources : Archives Nationales US

  

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