7 juin 1944
1st Lt Wendell A. McClure
Republic P-47D Thunderbolt # 42-26342
LM-S
56th Fighter Group, 62nd Fighter Squadron
8th Air Force
Lafraye (Oise)
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56th Fighter Group 62nd Fighter Squadron
Le 7 juin 1944, au lendemain du débarquement des troupes alliées sur les plages normandes, le 56th Fighter Group, basé à Boxted, dans l’Essex, envoya plusieurs de ces chasseurs-bombardiers P-47 « Thunderbolt » en mission au-dessus du nord de la France. Leur but était de rechercher et d’attaquer des objectifs d’opportunité au sol ou dans les airs afin d’empêcher l’afflux de renforts allemands vers le front.
Parmi les pilotes participant à cette mission se trouvait le 1st Lt Wendell Allen McClure. Né le 16 novembre 1922 dans l’Oklahoma, il résidait à Sweetwater, au Texas. Il s’engagea dans l’Army Air Corps le 14 août 1942. Après plusieurs mois de formation, il fut breveté pilote le 29 juillet 1943 sur la base de Forster, au Texas, avant d’être envoyé sur le théâtre d’opérations européen en intégrant le 56th Fighter Group, 62nd Fighter Squadron.

1st Lt Wendell A. McClure
Ce 7 juin, avec 59 missions à son actif, il était alors titulaire d’une victoire confirmée obtenue le 20 avril 1944 et d’une autre en collaboration obtenue le 31 mai.
Leader de sa formation, le 1st Lt Wendell A. McClure, à bord du P-47 # 42-26342 décolla vers 12 heures (heure anglaise) avec pour ailier le 1st Lt George E. Bostwick. Leurs Thunderbolts chargés chacun deux bombes de 500 livres emportaient également un réservoir supplémentaire de 200 gallons d’essence. Leur mission : survoler la région de Beauvais à Amiens à la recherche de cibles au sol à bombarder.
Après avoir franchi la Manche, les appareils se présentèrent au-dessus de Beauvais et piquèrent vers la gare pour y larguer leurs bombes. Parvenus aux environs de Grandvilliers, à environ 1 800 m d’altitude, le 1st Lt Wendell McClure repéra deux appareils allemands évoluant au-dessus de l’aérodrome occupé par la Luftwaffe. Après s’être débarrassé de leurs réservoirs supplémentaires, les deux pilotes s’élancèrent plein gaz vers les deux chasseurs ennemis qui disparurent dans les nuages. Après avoir essuyé sans dommage des tirs antiaériens de la Flak, une formation de trois Focke-Wulf-190 (selon le 1st Lt Bostwick) apparut plongeant vers eux. Après avoir essuyé de nombreuses rafales d’obus de 20 mm, les Thunderbolts pénétrèrent dans les nuages. Après en être sorti, le 1st Lt Bostwick engagea l’un des appareils ennemis, épuisa toutes ses munitions puis annonça qu’il rentrait à la base. A ce moment, le 1st Lt McClure avait disparu.
Le 1st Lt McClure fut-il victime d’un chasseur ennemi ou de la Flak ? Il fut contraint d’évacuer son appareil en feu qui s’écrasa dans un champ, sur le territoire de la commune de Lafraye, au lieu-dit « Le Champ Martin », entre Lafraye et Velennes.
Lors de l’évacuation, il se blessa légèrement lorsque ses jambes heurtèrent la queue de son appareil, se foula une cheville en atterrissant puis dissimula ses équipements de vol sous des feuillages.
Après s’être rendu sur le lieu du crash, les Allemands établirent le rapport suivant :
“Am 7.6.44 11.50 absturz einer Thunderbolt bei Lafraye 11 km no Beauvais. 100 prozent bruch (auf schlagbrand). Kennz. u. auftr. Nr unbekannt. Pilot fluechtig.”
“Le 7 juin 1944 à 11h50, crash d'un Thunderbolt près de Lafraye, à 11 km au nord de Beauvais. 100 % détruit (incendie instantané). Immatriculation inconnu. Pilote en fuite.”
Parvenu à échapper aux Allemands, le 1st Lt McClure se retrouva hébergé chez la famille Rendu, dans le village de Le Fay-Saint-Quentin. Des faux-papiers au nom de « Guy Petit » lui furent rapidement fournis. Pendant son séjour, il commença à se comporter comme une « tête brulée ». Il n’hésitait pas à sortir au grand jour pour aller au café en présence d’Allemands et se rendit chez un coiffeur. Etant donné son imprudence, les Rendu réclamèrent son déplacement dans une autre famille. Le changement fut organisé par la gendarmerie de Bresles dont certains membres étaient activement engagés dans la Résistance.
Dans la soirée du 13 juillet, le gendarme Alphonse Rouillard se chargea de déplacer le 1st Lt McClure chez Abel Pelletier et sa famille à Haudivillers. Le F/Sgt John E. Wainwright* muni de faux-papiers portant le nom de « Jacques Ledoux » qui était hébergé à la gendarmerie depuis plusieurs jours, fit partie du transfert.
* Le F/Sgt John Edgar « Jack » Wainwright occupait la fonction de bombardier à bord du Lancaster ME699, Squadron 44 de la RAF, abattu à proximité de Laversines dans la nuit du 4 au 5 juillet 1944 peu après avoir largué ses bombes sur les carrières de stockage de V-1 à Saint-Leu d’Esserent.
Avant-guerre, Abel Pelletier et sa famille habitaient à Bonlier, tout près de l’aérodrome de Beauvais-Tillé. Celui-ci fut occupé par la Luftwaffe dès septembre 1940 et les Allemands réquisitionnèrent leur maison. A proximité des pistes et des batteries antiaériennes, le village de Bonlier était soumis à de fréquents bombardements obligeant Abel Pelletier, sa femme et leurs 8 enfants, à venir habiter à Haudivillers.
McClure et Wainwright n’étaient pas les premiers aviateurs hébergés par la famille Pelletier. En effet, deux aviateurs américains, les 2nd Lts Andrew G. Claytor* et Roy J. Rice, avaient séjourné chez la famille Pelletier au cours du mois de mai avant de poursuivre leur évasion.
* Les 2nd Lts Andrew G. Claytor (pilote) et Roy J. Rice (copilote) étaient membres de l’équipage du Boeing B-17 du 381st Bomb Group tombé à Précy-sur-Oise le 25 avril 1944 au retour d’une mission de bombardement de l’aérodrome de Metz-Frescaty, en Moselle.
La maison d’Haudivillers était entourée de hauts murs. « Jacques » et « Guy » étaient ainsi à l’abri des regards indiscrets. Tout au long de leur séjour, ils devaient s'habituer à vivre au milieu de cette famille nombreuse. Confinés, ils occupaient leur temps à fabriquer des maquettes en bois de leurs avions. A la moindre alerte, consigne leur avait été donné de se cacher et de ne surtout pas parler. Les nombreux cultivateurs du village permettaient à la famille de subvenir aisément aux besoins en nourriture.

Debout : 1st Lt Wendell A. McClure, assis : F/Sgt John E. Wainwright
A l’insu des ses frères et sœurs, l’aînée des filles, Ginette, 19 ans, alias « Sidonie », était agent de liaison et convoyeuse d’aviateurs au sein du réseau d’évasion « Alsace » créé par Gilbert Thibault. La Libération approchant, il n’était plus question, à cette époque, d’évacuer les aviateurs. Ginette participait également à la récupération de parachutages dans le secteur. Elle était notamment présente pour celui opéré par le SOE dans la nuit du 24 au 25 juin 1944 près d’Haudivillers, l’un des plus importants réalisé dans le département de l’Oise. Trois tonnes d’armement et des postes émetteurs furent notamment récupérés cette nuit-là.

L'aviateur porte le même noeud papillon que sur la photo précédente.
Les deux aviateurs étaient de tempéraments différents. Wainwright était de nature calme tandis que McClure était « fougueux » parfois imprudent et davantage « sous surveillance ». Un soir, des coups furent entendus aux volets de la chambre de McClure. Celui-ci était sur le point de les ouvrir lorsque Ginette se précipita. Il s’agissait de soldats allemands qui s’étaient perdus. Un autre soir, rentrant d’une mission pour la Résistance, Ginette s’aperçut que McClure avait disparu. Après l’avoir cherché, elle le retrouva dans un café, jouant au billard. Ramené « manu-military » et sans un mot dans la maison, Ginette le sermonna sévèrement. Quelques jours plus tard, trois soldats allemands interrogèrent Ginette afin de savoir qui était ce civil qui ne parlait pas. Les explications de Ginette les convainquirent mais l’alerte avait été chaude.

Soldats allemands à Haudivillers
Puis les semaines passèrent. Le village d’Haudivillers fut finalement libéré le 31 août par les Armées alliées après des combats sporadiques au cours desquels le jeune FFI Jacques Boulanger fut tué par les Allemands.
Le 1st Lt Wendell A. McClure et le F/Sgt John E. Wainwright regagnèrent l’Angleterre quelques jours plus tard.
Après être rentré aux Etats-Unis, le 1st Lt Wendell McClure se maria le 30 novembre 1944 à Nolan, au Texas. N’ayant pas oublié la famille Pelletier, il envoya un colis contenant une robe ainsi qu’une photo de lui et de sa femme dans son ranch.

Wendell McClure et sa femme Meckie
Au cours de la journée du 7 juin 1944, cinq autres P-47 Thunderbolt tombèrent à la suite de combats aériens au dessus du département de l’Oise :
- P-47 # 42-76118 du 56th Fighter Group à Héricourt-sur-Thérain – 2nd Lt Alfred D. Evans (tué)
- P-47 # 42-26274 du 56th Fighter Group à Saint-Quentin des Prés – 1st Lt Donald J. Furlong (tué)
- P-47 # 43-25286 du 56th Fighter Group à Liancourt-Saint-Pierre – 1st Lt Harry F. Warner Jr (tué)
- P-47 # 42-46184 du 78th Fighter Group à Broyes – 1st Lt Harold H. Rice (prisonnier)
- P-47 # 42-25712 du 78th Fighter Group à La Hérelle – 1st Lt Harry H. Just Jr (tué)
Egalement sept Messerschmitt-109 :
- Me-109 # 163.830 de la 3./JG5 à Chiry-Ourscamp – Jürgen Fricke (tué)
- Me-109 # 440926 de la 9./JG1 à Beauvais – Werner Penke (tué)
- Me 109 # ? de la 9./JG1 à Nivillers – Franz Koplik (blessé)
- Me 109 # ? de la 9./JG1 dans le secteur Nivillers, Oroër, Verderel – Hubert Heckmann (sauf)
- Me109 # 441306 de la 4./JG11 à Tillé – Otto Schmidt (blessé)
- Me-109 # 440929 de la 6./JG11 à Laversines – Helmut Grill (tué)
- Me-109 # 440938 de la 6./JG11 à Tillé – Rudolf Prokay (blessé)
Sources :
- MACR 5494
- E&E Report 1362
- Témoignages de Ginette Pelletier recueillis par Marcel Mavré
- Rapport d'activité du gendarme Rouillard sur son activité dans la Résistance
- Documents de la famille Ruffin-Thourillon
- "La guerre 39-45 dans le ciel de l'Oise" - Marcel Mavré - 2012





