Nuit du 12 au 13 juin 1944
Handley-Page Halifax MkIII LW675
Squadron 578
Royal Air Force
Thieux (Oise)
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In English
Mission : Bombardement des installations ferroviaires d’Amiens Saint-Roch et de Longueau, dans la Somme.
Les appareils du Squadron 578 de la Royal Air Force décollèrent de la base de Burn (North Yorkshire) vers 23h30. Le bombardement s’avéra relativement précis.
Au cours du vol retour, vers 2 heures du matin et probablement après avoir été attaqué par un chasseur de nuit, le Halifax LW675 vint s’abattre à proximité du village de Thieux.
L’équipage du Halifax LW675 :
P/O Clifford NEWTON | Pilote | 22 ans |
RAF |
P/O George Caithness LAWRENCE |
Navigateur | 23 ans | RAF |
P/O William RENTON | Bombardier | RAF | |
F/S Sydney Evan Wallace CASS | Opérateur-radio |
22 ans | RAF |
F/S Geoffrey Raymond DEELEY | Mécanicien | 20 ans | RAF |
Sgt James B. REID | Mitrailleur dorsal | 22 ans | RAF |
Sgt Robert A. HOLLOCKS | Mitrailleur arrière | 20 ans | RAF |
Le rapport de gendarmerie établi le 13 juin 1944 mentionne : « Le 13 juin, à 2 heures, un quadrimoteur anglais s’est abattu à 700 mètres à l’est de la gare de Thieux. Appareil détruit. 4 occupants tués. Aucune victime civile ni dégât ».
En fait, cinq corps furent retrouvés parmi les débris du Halifax.


Sgt Robert A. Hollocks Sgt James B. Reid
Quelques temps plus tard, James Reid fut confié à Edmond et Jeanne Legras, épiciers du village.
Ils furent, par la suite, partagés dans différentes familles du village de Wavignies.
James Reid et Robert Hollocks séjournèrent ensuite à Thieux jusqu'au 9 juillet, notamment chez Dominique et Berthe Martin et leurs enfants Jacques et Huguette. A la moindre alerte, les deux aviateurs descendaient dans la cave.

Robert A. Hollocks et James B. Reid avec Jacques et Huguette Martin à Thieux.
Quelques jours après la chute de l’avion, un office religieux célébré par l’abbé Colineau se déroula en l’église de Thieux. La population, très nombreuse, chanta « la Marseillaise » en présence de la Comtesse Colette de Baynast. Les cercueils des cinq aviateurs furent placés sur le plateau d’un chariot tiré par des chevaux et prirent ensuite la direction du cimetière. Deux autres véhicules suivaient, chargés de fleurs. La cérémonie était encadrée par des représentants des organisations de résistance de la région malgré l’Occupation allemande.
Robert Hollocks et James Reid se rendirent le lendemain auprès des tombes de leurs compagnons d’équipage.

A gauche : Lucien Bertin portant l'un des cercueils.

Les Sgts Robert A. Hollocks et James B. Reid devant les tombes de leurs camarades d'équipage.
Transcription d’un article paru dans « Le Patriote de l’Oise » du 24 février 1945 :
" Thieux – On se souvient qu’au cours de la nuit du 12 au 13 juin dernier, un avion anglais a été abattu sur le territoire de notre commune. Cinq sur sept des membres de l’équipage trouvèrent une mort glorieuse, deux furent sauvés et purent échapper aux recherches ennemies grâce à l’action de la résistance locale. On se souvient aussi des funérailles si belles, si émouvantes, faites à nos cinq héros. Cela en pleine occupation boche.
Le président du Comité de Libération de Thieux reçoit de la maman du sergent aviateur Cass, un des cinq héros, la lettre suivante :
Cher Monsieur,
Voulez-vous, s’il vous plait, accepter de la part de mon mari et de moi-même, notre profonde gratitude et nos remerciements pour votre si grande bonté pour mon fils, le sergent aviateur S. Cass qui, avec les autres membres de son équipage, a été abattu à la suite d’une attaque ennemie la nuit du 12 au 13 juin. Il était notre seul enfant, nos cœurs sont meurtris de sa perte mais combien notre réconfort a été grand quand nous avons su récemment quelles funérailles émouvantes il a eues. Nous avons été profondément touchés par tant de merveilleuse délicatesse. S’il vous plait, transmettez à tous ces chers habitants de ce village tous nos remerciements qui seront toujours trop petits en rapport avec ce que vous avez fait. Dieu vous bénisse pour votre délicatesse ! et pour tant de fleurs si jolies apportées par ces chers habitants. Quel réconfort pour nous de le savoir reposant en un si bon endroit.
Un jour, quand tout sera terminé, nous viendrons pour le voir et aussi pour vous remercier de votre merveilleuse gentillesse. Toujours nous nous souviendrons de ces chers Français. Je suis sûre que si c’était à refaire, mon fils donnerait joyeusement sa vie pour votre liberté. Nous sommes bien seuls maintenant mais nous sommes fiers de sa vie et de son souvenir. Surtout, s’il y a des dépenses au sujet de l’entretien de la tombe, les fleurs etc…je vous prie de me le faire savoir et très volontiers nous vous rembourserons quand cela sera possible. Merci de tout cœur à ceux qui, si noblement apportèrent les fleurs, assistèrent au service religieux, nous avons su cela par les deux camarades qui revinrent.
Nous sommes vraiment très très reconnaissants et une fois encore merci. Dieu vous bénisse.
Puissiez-vous jouir longtemps de cette liberté pour laquelle notre fils a donné sa vie, tel est notre vœu.
Bien sincèrement votre,
A. H. E. J. Cass "
Par la suite, Robert Hollocks et James Reid furent pris en charge par le groupe de résistance d’Ansauvillers. Louis Delamare les hébergea pendant deux mois, jusqu’à la Libération.

Louis Delamare
En mai 1971, Georges Jauneau, attesta :
« Je, soussigné Capitaine Jauneau Georges, ancien chef départemental FFI, ancien responsable départemental de l'Oise du mouvement de Résistance FN-FTPF, Président de la Comission Départementale FFCI, certifie sur l'honneur que Monsieur Louis Delamare, né le 21/1/1920 à Paris 18e, était membre de la Résistance de l'Oise depuis le mois de décembre 1942.
Incorporé au détachement « Jacques Bonhomme », il prit une part très active à la Résistance dans son secteur : recrutement des patriotes pour les groupes de combat, récupération et remise en état d’armes abandonnées lors des nombreux engagements qui se sont déroulés dans cette partie du département en 1940, constitution de stocks d’armes et de munitions ainsi que celles que nous avons ramenées en avril 1943 de Noyon dans une camionnette avec messieurs Delamarre et Julien Sorel, de Valescourt, ces armes provenant de plusieurs parachutages reçus par l’OCM dans la région de Noyon et dont une partie avait été mise à disposition par la Direction départementale de l’OCM. Les principaux dépôts étaient situés au château de Wavignies et au cimetière de Catillon-Fumechon.
Principales missions exécutées :
- Juillet 1944 – Transport dans la camionnette de la sucrerie de Wavignies d’une partie des armes provenant du parachutage de Valescourt, à Froissy, Crèvecœur-le-Grand et Breteuil.
En juin 1944, il est nommé par moi-même responsable militaire du secteur (Wavignies-Ansauvillers-Sérévillers-Gannes) avec le grade de Sous-lieutenant.
Du 9 juillet au 9 septembre 1944, il héberge chez lui deux parachutistes anglais qu’il conserve malgré la présence de trois soldats SS qui occupent sa maison.
Lors des combats de la Libération, avec un effectif de 50 hommes, il libère les communes de Sérévillers et d'Ansauvillers et fait 17 prisonniers allemands.
Appelé en renfort par le groupe de Wavignies aux prises avec une importante unité allemande, monsieur Delamare combat avec ses hommes dans les dépendances du château auquel les Allemands ont mis le feu, après avoir tué M. Vincenot, chef militaire-adjoint, qui en défendait l’entrée avec ses camarades.
Au cours de ces opérations, le détachement de M. Delamare fait 70 prisonniers, s’empare de trois camions, deux voitures légères, une moto et une chenillette. Ce matériel m’a été remis et entreposé à Saint-Just-en-Chaussée où la subdivision militaire de l’Oise en a pris possession après la Libération ».

Robert Hollocks et la famille Delamare
Témoignage de Thérèse Peton alors âgée de 10 ans et qui habitait Ansauvillers :
« Un jour, les deux aviateurs étaient venus avec la famille Delamarre pour déjeuner chez nous. Au menu, entre autres, purée de pommes de terre, un régal en ce temps de guerre ! Auparavant, mes parents et moi avions été invités chez les Delamare où on nous les présentait comme des cousins. Cela m’avait intriguée parce qu’ils ne parlaient pas… L’un d’eux avait un vocabulaire français d’environ une vingtaine de mots au maximum… et avec un accent qui m’avait étonnée ».
Après la Libération de la région, ils regagnèrent l’Angleterre après s’être envolés de l’aérodrome de Beauvais.

Cimetière de Thieux
13 septembre 2025 - Cérémonie en mémoire de l'équipage du Halifax LW675